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Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/389

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augusta holmès.

de la mort, comme elle donne au rêve plus de douceur et à la gloire plus de magnificence. » [1].

Telle est la raison pourquoi c’est dans une Revue versaillaise qu’il nous a paru le plus opportun d’évoquer l’âme vibrante et la vie pathétique de cette femme si fièrement et si douloureusement femme, en même temps que quelques-uns des aspects d’une œuvre qui fut l’exact reflet de cette âme et de cette vie, — non le produit d’une ingénieuse et sèche cérébralité, mais le jaillissement spontané d’un cœur qui ne savait pas battre à demi et battit pour toutes les grandes émotions humaines, échelonnées de l’amour à l’héroïsme, en attendant qu’il se laissât toucher par l’émotion divine. En se frappant le cœur. Augusta Holmès a trouvé et fait sourdre une sorte de « génie », si, par ce mot employé sans emphase, nous entendons un ensemble d’impérieuses facultés naturelles et cette fatalité qui

  1. Nous reproduisons ici la lettre d’Augusta Holmès à M. Paul Fromageot, citée en tête de cette étude, en raison des renseignements intéressants qu’elle contient sur les liens qui rattachaient Augusta Holmès à Versailles :
    10 juillet 1898.

    Monsieur.
    Il y a si longtemps que j’aurais dû vous répondre, que j’ose à peine vous répondre maintenant. Ne trouvant pas d’excuse à mon retard, je prends le parti, tout en vous remerciant de votre si aimable lettre, (de Février, hélas !) de vous donner le renseignement que vous désirer, tout simplement.
    Je suis née à Paris, de parent irlandais. Mais je suis Française de cœur, vous n’en doutez pas, et d’adoption, puisque j’ai obtenu, après la guerre, mes lettres de grande naturalisation.
    Toute mon enfance et une partie de ma première jeunesse se sont passées à Versailles que j’adore pour sa majesté, pour l’incomparable silence de ses jardins de rêve, pour l’hospitalité qu’il accorde aux méditations des savants, aux fantaisies des poètes.
    Donc, je considère presque Versailles comme le lieu de naissance de mon esprit. On pourrait retrouver l’influence de Versailles dans beaucoup de mes ouvrages : les Dieux grecs que j’aime tant, ne sont-ils pas là, sous les grands arbres de ce parc admirable ? Et cette vie si peu moderne que j’ai menée, enfant et jeune fille, entre les bois chantants et l’immense bibliothèque de mon père, n’a-t-elle pas donné à ma pensée l’amour de la nature et de la solitude que je me suis efforcée d’y exprimer bien des fois ?
    Enfin, si je ne suis pas née à Versailles, je lui dois du moins les jours les plus ensoleillés de mon existence. C’est beaucoup, ne trouvez-vous pas ?
    Sur ce, Monsieur, je dois clore cette bien trop longue épitre, en vous priant, si jamais vous en avec le loisir, de venir causer un peu de la ville aimée, et des soirées musicales d’autrefois, chez le bon Guillot de Sainbris.
    Croyez, Monsieur, etc…
    
    Augusta HOLMÈS
    40, rue Juliette-Lamber.