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Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/93

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l’occupation prussienne à versailles en 1870-71.

énerver ici au point de nous arracher des larmes. Les paisibles habitants de la paisible ville de Versailles sont devenus des lions ; pas tous, malheureusement, mais le plus grand nombre enragent de ne pouvoir aller partager les dangers de ceux qui se sont armés pour nous délivrer et nous venger.

Le chirurgien en chef du roi de Prusse a dit à la sœur qui veille à son chevet qu’elle ne manque pas de le prévenir aussitôt l’entrée des Français à Versailles, afin qu’il se constitue de lui-même prisonnier.

Les officiers prussiens craignaient une Saint-Barthélemy ; aussi firent-ils plusieurs alertes nocturnes, dont notamment celle du 21 novembre qui tint éveillés et armés la plupart d’entre eux.

Dimanche 27 novembre.

Je ris encore en pensant aux mines d’un dragon prussien mangeant, chez un charcutier du quartier Saint-Louis, un saucisson. Ce dragon, chaque fois qu’il donnait un coup de dent, se demandait évidemment quel pouvait être l’animal matière première du saucisson. Quant à la physionomie du marchand, c’est tout un poème.

Caractère des officiers et soldats prussiens : taquins, menteurs, dissimulés, envieux. Les officiers supérieurs et généraux manquent tous de la distinction, de l’aménité et de la bienveillance naturelles aux gens haut placés. Les médecins, sauf ceux d’origine polonaise, ont su amonceler contre eux toutes les colères, toutes les irritations, par leurs exigences déplacées et leurs prétentions inouïes.

Lundi 28 novembre.

Le tact est chose inconnue dans l’armée prusienne, quel que soit le degré de la hiérarchie auquel vous vous adressiez…

Un colonel faisait un feu effrayant dans la maison où il était logé. À une observation, il répondit : « Si cette maison brûle, je m’installerai dans une autre. »

Jeudi 1er décembre.

À Étampes, un individu ayant appelé son chien : « Bismarck », fut arrêté, et des officiers prussiens firent pendre le chien.