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à lutter contre des peuples étrangers pour étendre ses possessions. Il en fait donc un paisible personnage n’ayant qu’à tracer des sillons en dehors de son premier domaine pour en accroître les dimensions, et en conséquence il lui fait donner une charrue et un aiguillon par Ormuzd, traduisant çufra par charrue et astra par aiguillon. Mais cette manière de voir est déjà en contradiction formelle avec l’histoire des premiers âges de l’humanité reconstruite par la science moderne, et aussi avec l’histoire des Aryas et avec celle de Yima, comme on le verra plus loin. L’une des autres causes qui ont déterminé de Harlez à traduire çufra par charrue, il le dit lui-même (t. Ier, p. 93) : « C’est l’usage que Yima fait de cet instrument au § 127. » Or nous allons montrer que c’est au contraire ce verset 127 qui prouve avec la dernière évidence que cet instrument ne peut pas être une charrue, ce qui nous force d’examiner la question de la construction du vara avant d’aborder celle de l’extension du territoire de Yima.

On a dû remarquer combien la description que l’Avesta fait du pays habité par ce roi convient au district d’Alatau, donné dans le paragraphe précédent comme la première patrie des Aryas. Au début du régne de Yima, les troupeaux de son peuple encore nomade vont paître dans les vallées, sur les sommets et jusqu’au bord des précipices des monts Alatau, pendant toute la belle saison, alors que la végétation de l’herbe des plaines est arrêtée par l’élévation de la température et la sécheresse du sol. Mais à l’arrivée de l’hiver, les neiges et les torrents gonflés rendent le pacage et la circulation impossibles dans la montagne. Les troupeaux descendent donc dans la plaine, où fort heureusement le climat est moins rigou-