Page:Revue de linguistique et de philologie comparée, tome 1.djvu/154

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 140 —

expressives d’avec ce qui appartient au langage analytique proprement dit. Par son timbre, par son degré d’altitude dans l’intonation, par ses modulations même, l’interjection traduit directement, soudainement, une situation morale tout entière avec une puissance, avec une fidélité d’expression que ne sauraient atteindre les phrases les mieux tournées. Ce caractère d’expression directe lui est commun avec la mélodie, j’entends de la mélodie qui jaillit des profondeurs du drame. Et maintenant, que certains cris interjectifs aient donné çà et là des verbes dérivés, comme le εὐάζω, je pousse ; des εὔα ! j’encourage, provenant de l’interjection εὔα ! cri d’animation, bravo ! courage ! c’est là un fait de détail qu’il suffit d’indiquer au passage.

En dehors des interjections, le langage indo-européen ne présente, en dernière analyse, que des monosyllabes pronominaux et des monosyllabes verbaux, ou, ce qui est la même chose, des pronoms simples et des verbes simples.

Le pronom est un geste oral indicatif de l’être individuel et de la place qu’il occupe ; il correspond à l’idée de substance. C’est de lui que sont nés, outre les articles, les prépositions, les adverbes et les conjonctions. Ceci veut dire qu’il y a une embryogénie et une histoire des idées pronominales que j’ai esquissées dans Français et Wallon, et que j’espère bien pouvoir développer un jour dans cette Revue.

Le verbe simple est une syllabe représentative de l’action ; et ici, par action, j’entends un mouvement, bruyant ou muet, conçu dans sa cause et observé dans sa direction.

Les actions sonores ou bruyantes ont provoqué la création de ces onomatopées que nous aimons tant à répéter