Page:Revue de linguistique et de philologie comparée, tome 1.djvu/97

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 83 —

Dans l’hymne que j’ai traduit et analysé, le lecteur a dû remarquer qu’Agni est surtout envisagé comme intermédiaire entre les dieux et les hommes, et comme sacrificateur, quoique bien des allusions soient faites à d’autres qualités qu’il possède. Je citerai la protection qu’il est censé accorder à la génération, ce qui est la cause de la demande qui lui est faite d’une nombreuse progéniture mâle. Mais son principal office est ici d’embraser les offrandes, de les consumer, et d’en porter l’essence dans ses flammes et sa fumée aux dieux qui descendent aussi pour goûter les dons des pieux humains. À côté de cet attribut, on a pu voir qu’il était aussi bienfaisant et amateur de la vérité ; le principe de ces qualités est contenu dans ces mots : « Dissipateur des ténèbres. » En effet, pour un peuple enfant tel que les Aryas de l’époque védique, rien d’effrayant, d’épouvantable, de malfaisant comme la nuit froide, pleine d’embûches, résonnant des cris des bêtes fauves, et si propice aux assassinats et aux larcins ; on comprend sans peine alors l’adoration de ces hommes pour le feu, qui remplace le soleil, qui réchauffe, qui déjoue les entreprises criminelles et nocturnes ; et, en se mettant à la place de ces tribus primitives, on partage aisément les sentiments qui faisaient appeler Agni, le feu divinisé, du nom de père, de pasteur de la vérité.

Ainsi donc, on a vu dans cet hymne Agni pontife et être bienfaisant. On le verra plus tard dans la suite de ces Études védiques chanté comme messager, comme dieu de la génération, envisagé enfin sous des formes variées et bizarres peut-être, et pourtant empreintes d’un profond sentiment de la Nature et du Réel.

Girard de Rialle.