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devant l’idiôme français, il est facile de constater un fait assurément curieux : c’est que le patois gallot contient un nombre très-restreint de mots d’origine celtique certaine ou fortement probable.

Sur les cinq mille mots que j’ai recueillis, une centaine seulement, c’est-à-dire un cinquantième, ont une origine bretonne.

Le mot yan est le reste le plus remarquable et le plus caractéristique de la langue autrefois parlée dans les endroits où le français règne maintenant sans partage. Yan est évidemment une prononciation nasale du ya breton ; comme lui, il signifie « oui ».

On le rencontre employé avec ce sens, non seulement dans les communes voisines de la limite des deux langues, mais encore dans la partie de l’ancienne province de Bretagne qui touche la Normandie, et qui forme la transition entre les deux pays.

Nonna, nona, nouna, un peu moins généralement employé, et qui semble avoir en quelques contrées une tendance à disparaître, est d’une origine bretonne moins certaine : on peut y voir une prononciation allongée et corrompue du nan breton (non), à moins qu’on ne préfère le rattacher au vieux français non a, qu’on trouve dans les auteurs des XIIe et XIIIe siècles, et qui est employé plusieurs fois dans l’immortelle farce de Maistre Pathelin.

L’interjection madé ou mada peut également être rattachée, soit au ma doué ou va doué breton (mon Dieu !), soit au juron du XVIe siècle, par mananda, dont il serait une forme contracte ; mais cette hypothèse est un peu subtile, et je ne m’y arrête pas.