Aller au contenu

Page:Revue de linguistique et de philologie comparée, tome 20.djvu/341

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 331 —

les origines du français au latin classique. Voici comment s’exprime M. Gidel :

« C’était la coutume des Romains, dit saint Augustin, d’imposer leur langue à toutes les nations qui subissaient le joug de leur empire. Tacite nous fait voir Agricola multipliant les écoles dans la Bretagne à moitié vaincue ».

Le passage de Tacite n’a pas la portée que lui donne M. Gidel : « Jam vero principum filios liberalibus artibus erudire, et ingenia Britannorum studiis Gallorum anteferre, ut qui modo linguam romanam abnuebant, eloquentiam concupiscerent ». (Ann., 21.)

Ce principium filios nous montre bien que cette influence de la langue latine ne s’exerçait que sur les couches les plus élevées de la société.

Les nombreuses citations par lesquelles M. Gidel établit à quel point les lettres latines étaient célébrées en Gaule ne sont pas plus concluantes. Oui, ce pays a fourni, en grand nombre, des écrivains, des rhéteurs, des jurisconsultes et des avocats ; mais qu’est-ce que cela prouve pour la masse de la population ? Montrez-nous les nombreuses écoles élémentaires où des millions d’hommes auraient pu apprendre la nouvelle langue ! Et encore, cela aurait-il suffi ? Ne voyons-nous pas, un peu partout, les patois subsister à côté des langues officielles, là même où toute la population passe par les écoles ?

Comment le latin littéraire est-il devenu le français ?

« Plus un instrument est délicat, plus il risque de se briser entre les mains de ceux qui le manient. La délicatesse de la langue latine la destinait au déchet qu’elle a subi peu à peu. Elle était soumise à des règles trop difficiles pour qu’elles fussent toujours observées. Sa construc-