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Page:Revue de linguistique et de philologie comparée, tome 20.djvu/342

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tion savante, ses modifications ingénieuses, ses flexions casuelles, doivent peu à peu se disloquer, se brouiller et finir par disparaître ».

Puis M. Gidel nous montre le latin littéraire et officiel devenant de plus en plus barbare, les erreurs de cas, de genres, fourmillant de plus en plus, etc.

N’est-ce pas la preuve qu’on avait affaire à une langue d’école ? Est-ce que le désarroi, puis l’écroulement du monde officiel impérial ne devait pas se trahir dans sa langue, qui faiblissait sous les assauts de la langue populaire gauloise pénétrant de plus en plus dans le monde administratif et littéraire ? C’est là le propre de ces langues que j’appellerai artificielles, qu’elles s’écroulent en même temps que la domination qui les a imposées : ce sont les seuls cataclysmes linguistiques possibles. C’est ainsi que nous voyons disparaître certaines espèces végétales et animales importées, dés que l’homme n’est plus là pour les défendre contre l’envahissement de la faune et de la flore indigènes. Mais pour faire disparaître ces dernières, il faut une transformation géologique ou climatérique qui demande un grand nombre de siècles pour s’effectuer.

Quant à l’excessive délicatesse du latin, il ne faudrait pas trop l’exagérer. Sans doute, les langues littéraires affectent des tournures d’autant plus recherchées qu’elles s’écartent davantage de la langue du peuple : la construction allemande nous en est une preuve après la construction latine, tandis que la langue grecque, restée en communion avec le peuple, est beaucoup plus naturelle. Mais nous ne devons pas nous imaginer que même les Romains instruits parlassent en périodes arrondies et sonores, avec des esse videatur à la fin d’une phrase de