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18 REVUE DE MÊTAPHYSIQDE ET DE MORALE.

De tout temps, l’étiologie des maladies virulentes a été liée au problème des fermentations. Sous l’empire des idées de Liebig, les processus morbides étaient regardés comme la résultante de mouvements propres aux substances en voie d’altération s’étendant aux divers éléments de l’organisme. Avec les études de Pasteur les vues devaient se modifier. Aussi, dès 1864 le professeur Trauhe, à propos de la fermentation de l’urine dans les cas de rétention, transportait l’antagonisme des deux savants sur ce nouveau terrain et concluait suivant les idées de Pasteur. « La fermentation alcaline de l’urine ne s’est développée qu’à partir du moment où des germes de vibrion sont parvenus du dehors dans la vessie. » Dès 1862, Pasteur avait décrit ce petit champignon microscopique qui préside à la fermentation ammoniacale. Puis, ayant constaté que cet organisme n’évolue pas en présence de l’acide borique, il avait conseillé au Dr Guyon des injections de. cette substance pour prévenir la dangereuse fermentation dans la vessie. Le succès fut complet. Voilà comment l’étude expérimentale d’un microorganisme peut suggérer brusquement une innovation heureuse. L’ensemble des faits accumulés avait eu lui-même son contre-coup dans la pratique le jour où l’illustre Lister, subjugué par tant d’indications précises, créait son pansement antiseptique, qui devait révolutionner l’art chirurgical. « Pour la première fois, écrivait Tyndall à Pasteur en 1876, nous avons le droit de nourrir l’espérance sûre et certaine que relativement aux maladies épidémiques la médecine sera bientôt délivrée de l’empirisme et placée sur des bases scientifiques réelles. Quand ce grand jour viendra, l’humanité, dans mon opinion, saura reconnaître que c’est à vous que sera due la plus large part de sa gratitude. » Ces paroles prophétiques arrivaient au moment même où Pasteur abordait l’étude du charbon. Sans être ni médecin, ni vétérinaire, il allait apporter la lumière dans un sujet où la vérité entrevue, mais non établie, fléchissait sous la contradiction. Le parasite du charbon avait été vu par Davaine et Rayer dès 1S80. Ces corps filiformes « ayant environ le double en longueur du globule sanguin », et n’offrant point de mouvement spontané, furent abandonnés pendant treize ans. Puis Davaine, trouvant quelque analogie entre ces filaments et le vibrion butyrique dePasteur, entreprit des expériences d’inoculation sur des moutons et des lapins avec du sang d’animaux charbonneux. Les résultats étant positifs, on se trouvait pour la première fois en présence d’une maladie contagieuse