Page:Revue de métaphysique et de morale, 1897.djvu/166

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LES PHILOSOPHIES DE LA LIBERTÉ

Une philosophie est un système, un tout organique, un ensemble de théories solidaires, dont l’une appelle l’autre, et qui toutes, dominées par des principes communs, conspirent. Prendre l’idée de la liberté comme centre de perspective, considérer l’esprit et le monde de ce point de vue, poser hardiment toutes les conditions qu’implique l’indétermination de la volonté humaine, pour cela, limiter, en les interprétant, les lois de la pensée et les lois de la nature, voilà, en termes généraux, ce qui caractérise « une philosophie de la liberté ». Le rapprochement de ces deux mots n’est pas sans causer quelque surprise. Le problème de la liberté semble un problème particulier, qui se pose à propos de l’homme, qui relève e d’une science spéciale, la psychologie, et qui doit y rester enfermé. Par quelle évolution des idées ce problème s’est-il universalisé ? comment est-il devenu, pour quelques penseurs, le problème philosophique par excellence ? Les constructions métaphysiques de l’antiquité et des temps modernes ont eu pour objet de donner des choses une explication qui satisfasse avant tout aux exigences de la raison comment la philosophie, si longtemps confondue avec la science même, tout intellectualiste, préoccupée d’exclure de l’objet tout ce qui ne se laisse point entendre, l’indéterminé, l’accident, en vient-elle, comme se trahissant elle-même, à se défier de la raison, de ses prétentions dogmatiques, de son ambition de tout définir et de tout comprendre ?

I

̃ II ne faut pas croire que c’est seulement de nos jours que les philosophes ont aperçu les rapports du problème du libre arbitre à