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212 REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

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M. Ribot le range parmi les physiologistes. Quel est le métaphysicien coupable d’avoir dit qu’il suffisait d’inculquer les principes pour qu’ils agissent ? Kantn’ajamais pensé comme le prétend M. Ribot que l’homme fût un être exclusivement raisonnable par nature, indifférent, mais peut-être et encore le sentiment de respect pour la loi morale n’est pas un état d’indifférence qu’il devait tendre à l’indifférence1. Quant à Herbart et aux intellectualistes de son école, ils distinguent des idées comme telles, douées d’une force intrinsèque, les idées liées de façon à constituer des vérités ; et la force des idées ne dépend nullement, selon eux, de leur valeur en tant que vérités 2. En revanche, les prétendus empiriques n’ont pas été les moins confiants dans la toute-puissance de la raison humaine ; et, parmi les amis intellectuels de M. Ribot, on en pourrait trouver qui, physiologistes ou savants distingués, n’en sont pas moins convaincus tout comme leurs précurseurs du xvme siècle de la facilité avec laquelle l’humanité pourrait recevoir, immédiatement et tout entières, les lumières de la science.

Et en effet, aucune des deux formes d’intellectualisme que M. Ribot confond (^intellectualisme finaliste, l’intellectualisme mécaniste) n’est liée nécessairement à la thèse de la toute-puissance des idées dans la vie. Cela est évident de la théorie de « l’intelligence confuse », d’après laquelle tout se passe comme si les sentiments raisonnaient sur leurs intérêts. Il ne s’agit pas ici de jugement spéculatif, mais pratique, limite à l’utilité, et de jugement inconscient. Pour Descartes ce jugement n’est pas autre que l’émotion même 3 ; il en est la traduction intellectuelle, comme la formule mathématique traduit la couleur. Spinoza distingue de l’idée et de l’appétit qui n’est autre que l’idée du corps considérée comme force, Vidée de l’idée et la conscience de Vap’pêiit et toute sa théorie des passions est fondée sur l’hypothèse implicite de jugements ou de raisonnements •1. Voir sur la distinction du Vorstelten et du Denken l’herbartien Volkmann de Volkmar, Psych., i87*, vol. H.

. P. 351. Dumont distingue une autre forme d’intellectualisme l’intellectualisme objectif de Wolf. Selon cette théorie les sentiments correspondraient à des jugements sur la vérité ou l’erreur ; les métaphysiciens, comme Descartes, Spinoza, l’admettent pour,les émotions qui accompagnent l’activité de’ l’âme raisonnable. On peut dire que les sentiments généraux, moraux, religieux, etc., peuvent-être traduits si on les développe en langage d’entendement – en jugements de cette sorte ; ils constituent une forme, d’intelligence spéculative confuse.

. Voir les Passions de l’Ame, i" partie, art. 74 ; 2° partie, art. 91, 94.