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Page:Revue de métaphysique et de morale, 1897.djvu/380

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376 REVUE DE BIÉTAPHYSIOJOE ET. DE MORALE.

sants à expliquer comment des immobilités peuvent, en se juxtaposant et en s’additionnant, produire le mouvement.

C’est que la mobilité est le dernier caractère que l’on puisse négliger quand il s’agit de savoir ce qu’est le mouvement. Et précisément parce que le mouvement dans son essence ne se laisse pas reconstituer, il est réel et non pas seulement apparent. Les symboles mathématiques par lesquels on le figure sont incapables de décider par eux-mêmes si c’est le mobile qui se meut plutôt que les axes ou les points auxquels on le rapporte ; et d’un autre côté les causes que les physiciens ont imaginées pour distinguer, grâce à elles, le mouvement réel du mouvement apparent, ne sont déterminables que par rapport au mouvement lui-même. Reste, donc que ce soit le mouvement lui-même qui nous informe de sa réalité. Et c’est ce qui arrive en effet. Je suis positivement assuré de la réalité du mouvement quand je le produis après avoir eu l’intention de le produire et que le sens musculaire m’en apporte la conscience. Pourquoi en serait-il autrement quand je perçois des changements dans les choses ? Est-ce que, par exemple, un son ne diffère pas du silence, comme aussi un son d’un autre son ? Les mouvements réels sont donc saisis en eux-mêmes et non pas par relation à d’autres états que ceux qu’ils impliquent ce sont des absolus. A quoi tient cependant la distinction des mouvements apparents et des mouvements réels ? Pour répondre à cette question, remarquons simplement qu’elle suppose que la matière est divisée en corps indépendants, aux contours rigoureusement déterminés. Or cette division, relative aux exigences de nos sens, qui sont euxmêmes esclaves de nos besoins, est cependant contraire aux données premières de nos sens supérieurs, comme la vue et le toucher, qui ,portent sur le réel sans rencontrer d’interruption. Ce qui est, c’est une continuité mouvante où tout change et demeure à la fois ; nous en venons à dissocier ces deux termes, permanence et changement, a représenter la permanence par des corps et les changements par des mouvements homogènes dans l’espace. Or cette dissociation, loin de répondre à un intérêt scientifique, répond simplement à un intérêt vital, qui nous pousse à ériger en centres d’individualités séparées les parties du réel où doit se porter notre action. Et cette tendance à former des individus est fortifiée d’autre part par le sentiment -que nous avons de tracer autour de nous, à titre de consciences vivantes, des zones matérielles distinctes où rayonne l’in-