J’ai publié dans la Revue de Métaphysique et de Morale de juillet 1894 un article intitulé : « Sur la nature du raisonnement mathématique ». M. Lechalas en a fait une critique dans le numéro de novembre 1894.
D’autre part j’ai publié dans le numéro de novembre 1895 un article intitulé : « L’espace et la géométrie », que M. Couturat a critiqué dans le numéro de septembre 1896. Je voudrais exposer en quelques mots les réflexions que m’ont suggérées les articles de MM. Lechalas et Couturat.
Je ne veux pas engager une polémique qui, en pareille matière, serait forcément stérile ; il est aisé de comprendre pourquoi. Dans les études de ce genre, on s’efforce de s’affranchir du joug de certains habitudes d’esprit ; on cherche à rompre quelques-unes des associations d’idées auxquelles nous sommes accoutumés.
L’idéal serait de les rompre toutes, mais il ne peut être atteint.
S’il l’était, la pensée se trouverait en présence d’une poussière sur laquelle elle n’aurait plus aucune prise ; elle ne serait plus possible, et le serait-elle qu’on n’aurait plus de langage pour l’exprimer.
Qu’arrive-t-il alors ? Un auteur rompt telle association d’idées et conserve telle autre ; un second auteur fait le contraire. Dès lors, ils se sont interdit tout espoir de jamais se rencontrer. Ils travailleront plus utilement en poursuivant leur voie chacun, de son côté qu’en cherchant une rencontre impossible.
Des échanges d’observations, sans pouvoir aboutir à un accord ont cependant un bon côté. Nul de nous ne peut se flatter d’être toujours parfaitement clair, mais souvent il ne s’apercevra qu’il a été