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78 ItKVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

investigation dans le passé au moyen de l’archéologie et des documents fournis par les idiomes contemporains, on voit que, sur le segment AB, tous les renseignements positifs font défaut et qu’il n’est pas possible de procéder à son égard autrement que par analogie ou inférence de l’actuel au passé. Par conséquent, il est clair que la linguistique, qui ne s’alimente qu’aux sources de l’histoire et de la grammaire comparée, n’a point à s’inquiéter du mouvement du mobile depuis À jusqu’à B.

Mais il est permis de renverser le sens du mouvement, ou, tout au moins, le sens dans lequel notre esprit parcourt la ligne AB. Au lieu de partir de A, partons de B, c’est-à-dire considérons le phénomène, tel qu’il est donné actuellement (c’est, d’ailleurs, la première position qu’il a fallu prendre, avant toute conception historique et évolutive), et cherchons à combler l’intervalle qui sépare B de A, c’est-à-dire l’état actuel de l’état origine, celui-ci étant implicitement identifié avec l’état actuel du langage chez les animaux. Nous jalonnerons le segment AB en le divisant en un nombre plus ou moins grand de parties, doni chacune symbolisera une phase écoulée de l’histoire du langage et un état passé de ce que nous appelons aujourd’hui parole articulée et expression de la pensée. Voici donc autant d’éléments introduits dans la notion du langage en général, et une extension considérable donnée au concept primitif. C’est ainsi que l’on supposera un premier terme le langage-réflexe, réponse purement mécanique à une excitation externe, réaction ayant pris le chemin du larynx aussi indifféremment que d’autres voies de décharge motrice ; puis un second, le langage-signal, résultant du premier grâce à la sélection naturelle ; puis, s’il est possible, d’autres types plus complexes et plus voisins du langage significatif dont nous, hommes, nous nous servons. Méthode scientifiquement irréprochable. Et il y a tout lieu d’espérer, avec l’auteur, que les progrès futurs de la psychologie permettront de multiplier encore les intermédiaires à échelonner le long de la distance qui sépare le langage-réflexe du langage conceptuel.

Mais, d’autre part, n’est-il pas évident que le lien, qui unit toutes ces formes de transition, les unes hypothétiques, les autres tirées de l’observation actuelle de l’animal,et de l’enfant, n’est pas seulement un rapport physique de succession, que c’est, avant tout, un lien logique et un facteur d’intelligibilité, ’partant un rapport de pmneipe à conséquence ? Si nous ne possédions pas une connaissance