Page:Revue de métaphysique et de morale, 1898.djvu/19

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À parcourir le musée de l’histoire, la succession de ses tableaux barioles et bizarres, à voyager à travers les peuples, tous divers et changeants, la première impression de l’observateur superficiel est que les phénomènes de la vie sociale échappent à toute formule générale, à toute loi scientifique, et que la prétention de fonder une sociologie est une chimère. Mais les premiers pâtres qui ont considéré le ciel étoilé, les premiers agriculteurs qui ont essayé de deviner les secrets de la vie des plantes, ont dû être impressionnés de la même manière par l’étincelant désordre du firmament, par la multiformité de ses météores, par l’exubérante diversité des formes végétales ou animales, et l’idée d’expliquer le ciel et la forêt par un petit nombre de notions logiquement enchaînées sous le nom d’astronomie et de biologie, cette idée, si elle avait pu leur luire, eût été à leurs yeux le comble de l’extravagance. Il n’y a pas moins de complication, en effet, d’irrégularité réelle et de caprice apparent dans le monde des météores ou dans l’intérieur d’une forêt vierge que dans le fouillis de l’histoire humaine.

Comment donc, en dépit de cette diversité ondoyante des états célestes ou des états sylvestres, des choses physiques ou des choses vivantes, est-on parvenu à faire naître et croître peu a peu un embryon de mécanique ou de biologie ? C’est à trois conditions, qu’il importe de distinguer bien nettement pour se faire une notion précise et complète de ce qu’il convient d’entendre par ce substantif et cet adjectif si usités, science et scientifique. — D’abord, on a commencé par apercevoir quelques similitudes au milieu de ces différences, quelques répétitions parmi ces variations : les retours périodiques des mêmes états du ciel, des mêmes saisons,