Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 2, 1908.djvu/13

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vrage ne mérite guère son titre d’introduction critique. C’est un résumé clair, mais rapide et nécessairement superficiel des résultats obtenus par les sciences physiques et biologiques, par la cosmologie générale, l’astronomie, la géologie, etc., etc. Cette petite encyclopédie scientifique est encadrée dans certains développements philosophiques assez vagues sur l’espace, le temps, la matière, les notions de force, de masse, d’énergie, de causalité, de finalité, de lois naturelles, etc. Les deux derniers chapitres forment une partie intitulée : conclusions métaphysiques. L’auteur y affirme ses sympathies pour le théisme et repousse la croyance à l’immortalité de l’âme.

The persistent problems of philosophy, an introduction to metaphysics through the study of modern systems, by Mary Whiton Calkins. 1 vol. in-12 de xxii-575 p., New-York, Macmillan, 1907. – Ce livre se présente à la fois comme un abrégé critique de l’histoire de la philosophie moderne depuis Bacon, et comme un essai de systématisation originale. Sous le premier aspect, c’est une classification des doctrines envisagées du point de vue ontologique ; sous l’autre aspect, c’est un exposé, – vers lequel s’achemine la partie historique et critique, – des vues propres à l’auteur, qui sont aussi comme nous le verrons, celles du philosophe américain Josiah Royce.

Matériellement le livre est divisé en deux parties d’inégale longueur. La première et la plus importante est constituée par cet exposé, tour à tour historique et dogmatique, dont nous venons d’indiquer le double aspect. La seconde est un recueil de notices biographiques, de commentaires destinés à éclaircir les points qui n’ont pu faire, dans la première partie, l’objet d’un développement complet. Suivent des d’indications bibliographiques, qu’on pourrait souhaiter plus nombreuses, mais que l’auteur a visiblement rédigées pour les seuls lecteurs anglais.

Tout système philosophique, dit miss Calkins (Préface), est une réponse à la question : Quel est l’objet « ultime » de la pensée spéculative ? Ou, si l’on veut, comment faut-il concevoir ce qui est au delà des données de l’expérience en général ? Par la nature de leurs réponses, tous les systèmes se rangent, d’une manière très simple, en deux premiers groupes : pluralistes ou monistes, selon que l’objet ultime qu’ils assignent à la recherche philosophique est numériquement multiple, ou numériquement simple ; — puis en deux sous-groupes : idéalistes ou non-idéalistes, selon qu’ils se représentent cette réalité dernière « comme étant de la même nature que la conscience que j’en ai, ou comme étant d’une nature radicalement différente de ma conscience » (p. 10).

Appliquant cette classification à l’histoire de la pensée moderne, miss Calkins étudie successivement les systèmes : de Descartes, dualisme pluraliste (dualiste par sa distinction radicale des deux substances, pluraliste parce qu’il admet l’existence séparée de plusieurs de ces substances) ; — de Hobbes, matérialisme pluraliste ; — de Leibniz et de Berkeley, spiritualismes pluralistes ; – de Hume, idéalisme pluraliste ; – puis les systèmes monistes de Spinoza, pluralisme moniste (moniste, à cause de l’unité de la substance, pluraliste à cause de la multiplicité des attributs et des modes) ; et de Hegel, type d’idéalisme moniste. Dans l’intervalle, la philosophie s’est lentement dégagée des divers pluralismes sous l’influence de la critique kantienne, et des efforts, qui tendent au monisme idéaliste, sans y arriver, de Fitchte, de Schelling, et de Schopenhauer. Sans y arriver, disons-nous, parce qu’en dernière analyse il faut reconnaître que la réalité ultime, pour ces penseurs, n’est pas vraiment un « moi » ; tandis qu’au contraire, selon miss Calkins (ici en désaccord avec la plupart des historiens), l’Absolu hégélien a tous les caractères d’une conscience.

L’auteur a pour la solution hégélienne du problème métaphysique le goût très vif que partagent tant de penseurs anglais. Mais elle ne croit pas que cette solution soit acceptable en totalité. Le problème subsiste, même après Hegel, bien que la solution n’en puisse plus être donnée que par une conception, et moniste, et idéaliste, des choses. Miss Calkins en vient ainsi à l’examen de diverses doctrines contemporaines : le phénoménisme néocriticiste, l’idéalisme bergsonien, et diverses formes du pragmatisme. Son analyse lui ayant révélé, au fond de toutes ces doctrines, l’existence du postulat « pluraliste », elle se retourne vers la seule philosophie qui la satisfasse, parce qu’elle lui paraît concilier les exigences d’un esprit métaphysicien avide d’unité, et cet idéalisme qui lui semble être la forme même de la pensée européenne depuis Kant : c’est le système de son maître M. Josiah Royce, sorte de personnalisme qui s’efforce à concilier les deux types de pensée, moniste et pluraliste.

« Le personnalisme moniste, nous dit-on, s’efforce de montrer qu’au-dessus de la multiplicité des individus, et les comprenant, il existe un moi absolu qui constitue leur relation même (their related-