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Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 2, 1913.djvu/10

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éventuellement le pouvoir de les abolir ; le monde construit par l’homme ne peut plus entreprendre sur sa liberté. M. Külpe rejette énergiquement cette sorte d’anarchisme cosmologique : l’individu, pense-t-il, est devenu un rouage d’une immense machine dont il ne connaît ni le mécanisme ni le but ; il s’agit pour lui bien moins de cultiver son moi que sa capacité d’agir et de servir ; « notre valeur n’est pas mesurée par ce que nous ressentons et ce que nous espérons, mais par ce que nous devons et par ce que nous faisons ». Et nous ne surmontons pas la nature et l’histoire en reconnaissant la nature a priori de notre pouvoir de connaître, mais en opposant une résistance continuelle aux dangers qui nous menacent.

Cette introduction de M. Külpe, — où sont indiquées les conditions et les tendances profonde, invisibles et informulées qui déterminent beaucoup plus que des arguments et des raisonnements la constitution et l’adoption des systèmes philosophiques, — ne prépare pas seulement de la manière la plus heureuse un outrage où seront démontrées la possibilité de la réalisation et la légitimité profonde en même temps que l’autonomie foncière des sciences du réel ; elle constitue aussi une contribution profonde et originale à la psychologie et à la logique de la pensée philosophique en général.

Psychoanalyse und Ethik, par le Dr Karl Furtmüller, 1 broch. in-8 de 34 p., Munich, Ernst Reinhardt, 1912. — Cette brochure est le premier numéro d’une série de publications du Verein für freie psychoanalytische Forschung qui s’est détaché en 1911, à la suite de démêlés divers, de l’Internationale psychoanalytische Vereinigung dirigée par le Professeur Sigmund Freud. La nouvelle société se propose d’utiliser, pour la solution de questions psychologiques, philosophiques et pédagogiques, les résultats empiriques de la neuropsychologie » (p. v). M. Furtmuller a voulu, en portant spécialement son attention sur la psychologie du vouloir, passer en revue « quelques chapitres de la morale sur lesquels la « psychoanalyse « projette une lumière nouvelle » (p. 2). — Au centre de la morale moderne est l’idée de bonne volonté ; la conscience est le témoin de la bonne volonté ; or la psychoanalyse nous révèle les erreurs de l’introspection, « l’amour se cachant derrière la haine, l’obéissance qui dissimule une résistance inconsciente, une modestie qui n’est qu’ambition démesurée, une chasteté qui se croit inspirée de motifs moraux et qui n’est que crainte du rapprochement sexuel » (p. 4) ; il ne faut donc pas s’en tenir aux déclarations, même sincères, de la conscience, il faut en appeler, non pas du conscient à l’inconscient, mais de la conscience rétrécie à la conscience élargie » (p. 7), et de la conscience naïve à la conscience critique. À ce principe l’auteur rattache une série de considérations sur la morale et les systèmes moraux, inspirées principalement d’Alfred Adler, mais dont le lien et la nouveauté n’apparaissent pas très nettement.

Zur Begriffsbestimmung der Philosophie. Eine kritische Erörterung, par le Dr Nicolaus Petrescu, 1 broch. in-12 de 92 p., Berlin, Leonhard Simion, 1912. — Ce travail est un nouvel essai de détermination de la notion de philosophie. Cette science n’est encore en possession ni de son objet ni de sa méthode. Il s’agit donc de savoir enfin ce qu’est la philosophie et ce qu’elle représente pour la connaissance, quelle est sa valeur de connaissance. La philosophie nous est donnée comme toute autre science, il s’agit de découvrir sa nature propre et son contenu authentique (p. 10-11). Historiquement la philosophie se présente sous quatre aspects : 1° comme science : la philosophie est la science universelle pour l’empirisme et le rationalisme du xviie siècle, pour Bacon et pour Hobbes, pour Descartes, pour Leibniz ; 2° comme métaphysique, comme connaissance absolue de l’essence des choses et des causes premières ; 3° comme théorie de la connaissance, quand on admet l’impossibilité de la métaphysique ; 4° comme art, comme activité purement subjective de l’esprit. Chacune de ces définitions divergentes tend d’ailleurs à mettre la philosophie au premier rang des sciences, à en faire le degré suprême de la connaissance humaine, la connaissance absolue. Ceci pose, M. Petrescu affirme l’impossibilité de la métaphysique, et d’autre part l’insuffisance et l’impossibilité de la théorie de la connaissance. Il s’attache ensuite à distinguer les notions de science et de philosophie : la science a affaire à des faits d’expérience particuliers, la philosophie à des concepts généraux ; la science observe, assemble et ordonne des faits d’expérience afin d’en extraire des propositions valables pour un domaine déterminé de la science, la philosophie étudie le savoir humain en général. La science étant une analyse des phénomènes, le procédé inductif y domine ; la philosophie, étant la connaissance de l’universel, procède surtout par déduction. La division du travail, qui s’impose dans les sciences, ne peut guère avoir de place en phie