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Wenzel. Erster Band, Spinozas Lehre von Golt, von der menschlichen Erkenntniss und von dem Wesen der Dinge, 1 vol. in-8 de viii-479 p. Engelmann. Leipzig, 1907. — Outre une introduction d’une quarantaine de pages contenant des aperçus généraux sur la philosophie de Spinoza, sa position historique et son importance présente, l’ouvrage comprend deux parties principales dans la première est exposée la théorie de la connaissance, dans la deuxième la doctrine relative à l’essence des choses.

1° Le point de départ nécessaire de toute connaissance est le fait de la perception sensible, l’idée inadéquate dont l’âme est affectée en vertu d’un ordre commun de la nature qu’elle ne peut concevoir clairement ; telle est, en effet, la condition de l’homme que les choses doivent être imaginées par lui et qu’il doit être contraint par elles avant qu’il puisse les connaître et conquérir sa liberté. Le monde de l’expérience sensible, loin d’être un fantôme irréel duquel le sage doive se détourner est la réalité même, imparfaitement, confusément perçue. Toute idée a un objet réel et par conséquent se rapporte à Dieu car le réel est Dieu et Dieu est le réel. Telle est la pensée directrice de l’auteur dans la partie de son livre où il montre comment l’homme peut s’élever à la science intuitive et se donner la béatitude.

2° Dieu étant posé d’autre part, la nature, qui est un devenir perpétuel, est posée par cela même car l’unité de la substance divine n’exclut pas mais implique l’infinie multiplicité des attributs et des modes et le changement, loin d’être une apparence vaine, exprime la libre activité de Dieu. Dieu est l’être indéterminé en ce qu’il a un pouvoir infini de se déterminer lui-même et chacune de ses déterminations enveloppe toutes les autres : ainsi les attributs peuvent bien être conçus séparément par l’entendement humain, en eux-mêmes ils sont absolument inséparables, non du tout des formes sous lesquelles nous percevrions la substance mais des modes réels d’existence (Daseinsweisen) lui appartenant ; les choses par lesquelles s’exprime l’inépuisable fécondité de l’être, occupent bien, pour qui les considère du dehors, une place dans la durée à la suite les unes des autres et sont bien produites ou causées les unes par les autres, l’existence de chacune d’elles n’en est pas moins une suite nécessaire de son essence considérée comme elle doit l’être dans sa relation avec toutes les autres essences. Si d’autres interprètes sont arrivés à des conclusions différentes c’est qu’ils ont mal saisi le rapport existant selon Spinoza entre la substance et les attributs ou entre la substance et les modes. M. Wenzel examine en particulier la thèse connue de Camerer et fait voir qu’elle découle de ce que, suivant cet auteur, « Spinoza aurait bien affirmé mais n’aurait nullement rendu concevable l’unité des attributs dans la substance et avec elle la liaison des choses produites par les attributs ». Zeller avait dit non moins faussement que « dans la substance de Spinoza les attributs s’excluent qualitativement bien qu’ils soient donnés comme constituant un seul et même être ».

C’est dans la dissertation de Friedrichs, Der Substænzbegriff Spinozas, neu und gegen die heerschenden Ansichten zu Gunsten des Philosophen erläutert, Greifswald, 1896, que M. Wenzel a trouvé, comme il le déclare dans son avertissement, avec une intelligence plus claire et plus complète de la pensée de Spinoza une notion de l’être spinoziste permettant de résoudre les problèmes jugés insolubles par un trop grand nombre d’interprètes. À cette dissertation M. Wenzel se réfère souvent et il en cite de nombreux passages. Moins nouvelles peut-être, au moins en France, qu’il ne le croit lui-même, ses vues nous paraissent dans l’ensemble d’une justesse irréprochable. Sur certains points on souhaiterait des explications plus précises, le plan suivi par l’auteur l’amène à présenter les mêmes idées plus souvent peut-être qu’il ne serait nécessaire, son livre n’en est pas moins des plus intéressants et l’on voit, dès le début, que l’auteur, très épris de son sujet, a vécu dans une longue familiarité avec les écrits de Spinoza.

Die Kunst, 2e édition. Tome III : De la Völkerpsychologie de Wilhelm Wundt. 1 vol. in-8 de 564 p., W. Engelmann, Leipzig, 1908. — On sait que la psychologie ethnique devait, d’après le plan primitif, comprendre trois volumes seulement : Le langage, Le mythe et Les mœurs. Mais, ainsi que l’auteur le rappelle dans sa préface, l’œuvre ne tarda pas à s’étendre bien au delà des limites prévues. « L’art » rattaché d’abord au « mythe », se présente aujourd’hui non plus comme un simple chapitre, intermédiaire entre la psychologie de l’imagination en général et celle de l’imagination mythologique, mais comme un volume spécial bien délimité et comme un terme de passage important entre le langage et le mythe.

Wundt étudie d’abord l’imagination comme fonction psychique générale, en exposant les données fournies par l’ana-