Page:Revue de métaphysique et de morale, supplément 6, 1910.djvu/30

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conduire certains, philosophes à cette idée d’une « plateforme philosophique », en a poussé quelques alttres à nier qu’un accord fût possible et désirable en philosophie. Les uns se sont bornés à affirmer qu’il faut philosopher non en mathémarticien ou en physicien,’ mais en philosophe, et que la logique mathématique dont voudraient se servir les défenseurs de la « plate-forme n’est pas encore une science certaine et complète (Harold Chapman BROWN, Vil, 491); d’autres ont; ajouté que le- raisonnement scientifique est une série d’abstractions (Shelton,. VI, 533, Vil, 481); d’autres ne se bornent pas attaquer; ils opposent à la con- • ception de la « plate-forme » une doctrine tout opposée; pour Morris R. Cohen, la philosophie n’est pas une science spéciale, mais la connnaissance de la vie et de l’univers; elle se fonde sur un acte créateur (VII, 401); pour Goddard, le philosophe comme le poète cherche ce qu’il y a de plus profond dans l’existence, « le sang et la chair même de la vie » (VII, 124). Mais pour Çotien et Goddard même, le philosophe, tout en étant un poète, doit souvent se rapprocher du savant. De nombreux phitosophes essaient de trouver une doctrine concrète et précise à la fois dans le réalisme. MM. Montaoue et Perhy s’en sont faits cette année dans le journal les principaux défenseurs. Montague étudie les rapports du réalisme et du pragmatisme; selon lui, ils s’unissent en général naturellement (VI, 485, 543, 56! VII, 141). M. Perry critique le « relâchement méthodologique » des principales doctrines contemporaines, et énumère leurs sophismes. Prédicament égocentrique de ce que toute chose est connue par nous, on conclut à l’idéalisme, sans voir que, si la méthode de concordance s’applique, la méthode de différence ne pourra jamais s’appliquer. Sophisme de la pseudo-simplicité. Sophisme de l’implicatioji transcendai) tequimènealacroyance en des choses en soi. Sophisme de la particularité exclusive qui conduit à dire

qu’un terme ne peut appartenir à plus d’un système. D’autres encore (VI, 709, VII, 5, 337, 365). Les réalistes ne se sont pas bornés à critiquer; fidèles à l’idée d’une coopération entre philosophes, six’d’entre eux se sont mis d’accord sur certains principes fondamentaux; chacun des six réalistes a rédigé une liste de principes qui a eu l’approbation de tous. 11 faut signalersurtout leslistes de MM. Holt, Pitkin

et Spaoluikg; les trois autres, intéressantes aussi, sont celles de MM. Perry, L MoNTAGuE et Marvin. Le réalisme apparait surtout dans ces déclarations comme philosophie bergsonienne et le pragmatisme. William James a fait naître toute une controverse sur ce point, par son analyse de l’œuvre de M. Bergson dans le Pluralistic Unicerse, et par son article Bradley or Bergson, où il force le philosophe à opter entre l’absolutisme et la méthode bergsonienne, celle-ci toute proche de la plénitude et de l’activité de la vie (VII, 29). MM, Montague et Leiuhton ont critiqué les idées que James loué dans les œuvres de M,. Bergson. M. Montague ne veut pas de ce qu’il appelle « les logiques nouvelles fabriquées en France »; notre pensée, dit-il, si elle sépare et disjoint les termes, ne le fait que pour mieux pouvoir saisir ensuite la réalité telle qu’elle est (VII,, 141). Pour M. Leighton, c’est l’entendement et non l’intuition qui découvre la continuité; ou plutôt nous ne trouvons jamais qu’une union harmonieuse entre la continuité et la discontinuité (Vil, 231). M. Pitkw fait remarquer que, dans certains cas, par exemple dans la physique mathématique, le concept a pour M. Bergson une valeur absolue « Si jamais un philosophe a enseigné qu’il faut se fier aux concepts dans la mesure où nous savons quelles opérations nous accomplissons avec leur aide, et dans la mesure où nous en usons intelligemment, c’est bien M. Bergson. » Il oppose ainsi la philosophie bergsonienne et celle de William James (VII, 225)..M.. Bergson a rectifié quelques points i mportants de l’interprétation de M. Pitkin, en ajoutant quelques remarques précieuses sur les valeurs différentes qu’il faut accorder à la perception des objets découpés dans t’espace et à celle des qualités qui sont des continuités sensibles, à la construction du concept et à celle de la loi (VII, 385)

En même temps qu’ils recherchent les présuppositions du pragmatisme (théories de la valeur, de la vérité comme relation concrète, de la durée, de l’intellect), les auteurs américains se demandent quelles consequences pratiques, pour la constitution d’une méthode philosophique, on peut tirer des récentes discussions. Si la vérité est cette adaptation concrète dont parlent le? pragmatistes, ne faut-il pas avoir en vue des problèmes particuliers et, pour les résoudre, partir de quelques principes fondamentaux? C’est ce que déclarent M.l. Dewey (par exemple VII, 479) et Karl Schmidt la philosophie a une tache à remplir; il faut donc que chaque époque se décide à occuper une place définie dans l’évolution de la connaissance, et s’y tienne fermement (VI, 0731. Mais le pragmatisme, s’il a pu