Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/23

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le contenter. La nature est toute mouvement, et « le mouvement est une sorte de vie ». Pour expliquer les êtres, ce n’était pas l’idée ou le nombre qu’il fallait invoquer, mais l’âme.


Une maxime domine sa philosophie, maxime que n’avaient pas ignorée les plus grands de ses prédécesseurs, Platon surtout, mais dont il fut le premier à faire une règle universelle : c’est que le « meilleur », en tout, est le « premier ».

La première démarche de la philosophie doit être de sortir de l’équivoque introduite par l’entendement et le langage en distinguant entre les divers sens que cache la vague généralité des conceptions et des termes. Le terme d’être a des significations très différentes, ne s’appliquant pas seulement à ce qui existe en soi, mais aussi à ce qui n’existe qu’en une autre chose, de laquelle l’abstraction seule la détache. Telles sont les qualités ; telles sont surtout les quantités, où le Pythagorisme et le Platonisme ont cru trouver les principes des êtres. L’Être proprement dit, c’est le sujet, ou substance, en quoi seul existent les modes, et qui seul existe par lui-même. C’est là le « premier » ; tout le reste, qui y est relatif et en dépend, est secondaire.

Qu’est-ce donc qu’être, à proprement parler ? C’est, répond Aristote, agir. Quod enim nihil agit, nihil esse videtur, dira d’après lui un autre. L’action est le bien, car c’est le but de tout. Aussi est-ce ce qui précède tout. Et l’action, c’est l’âme. Aussi l’âme est-elle la vraie, la seule substance. Le corps est le virtuel, l’âme est l’acte qui en est la fin, et la fin est aussi le principe.

Dira-t-on, avec celui qui fut après Platon le chef de son école, que dans un germe le virtuel précède et l’actuel vient après, puisque c’est de la puissance d’agir que le vivant passe par degrés à l’énergie et l’action, en sorte que le bien et le beau n’apparaissent pas d’abord, mais au terme seulement ? Les germes, répond Aristote, émanent d’un vivant adulte, parfait en son espèce. C’est son action qui, imprimée au germe, le mène de degré en degré, lui aussi, à la perfection où il devient semblable à son auteur. À l’action appartient donc partout et toujours la primorité.

Comment en effet de la simple puissance proviendrait jamais l’action ? La puissance nue, comme parle Leibniz, ne peut pas même exister. Point de puissance réelle sans quelque tendance actuelle, c’est-à-dire sans quelque commencement d’action. Au lieu que l’action