Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/353

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ces forces dans l’organisation des êtres vivants, végétaux et animaux, un exemple peut-être n’est pas inutile. Qu’on suppose, sur un billard, une bille lancée dans une certaine direction. La propulsion de la bille représentera l’essor initial du potentiel de vie se manifestant dans l’espace, agissant sur l’atome matériel, et l’élasticité des bandes qu’elle rencontre, représentera la résistance que, dans certaines directions, rencontre cet essor. La ligne brisée engendrée par le déplacement de la bille représentera la forme organique déterminée par le concours du potentiel de vie et des forces du milieu. La comparaison est très lointaine, mais on peut la rapprocher d’une similitude en supposant que l’impulsion initiale donnée à la bille, au lieu d’être simplement rectiligne, implique une composition de forces et, par suite, une trajectoire courbe, par exemple — ce que les joueurs de billard appellent un effet, — car il se peut que le potentiel de vie, pour construire la cellule, implique une composition de forces, qu’il ne soit pas simple. Nous ignorons ce qui le constitue, mais quel qu’il puisse être, l’énergie dont il est dépositaire, en tant que plastique, c’est-à-dire en tant qu’elle se crée ses organes avec les matériaux que lui offre son milieu, n’opère pas sur tous indistinctement, mais en adapte certains à sa communication avec le monde extérieur et, pour se les approprier, doit les dégager du sol, de l’eau, de l’air, et les disputer à la pesanteur. La forme organique est ainsi conquise sur le milieu par la virtualité plastique du germe, et, à ce titre, elle est toujours le résultat d’une lutte pour l’existence, si infime soit-elle. Une graine qui germe, et par là commence la construction du végétal, réagit en présence des forces physiques et chimiques contenues dans le sol, mais par cette réaction même elle les asservit et les emploie à son œuvre.

Faisons abstraction de toutes les différences de structure altribuables à l’adaptation de la forme initiale aux diverses conditions qu’elle rencontre dans les divers milieux terrestres, dans le sol, dans l’eau, dans l’air, nous arriverons à isoler cette forme-type impliquée dans le potentiel de vie, c’est-à-dire prescrite par lui seul à son organisation en quelque sorte idéale. Cette forme-type, doit-on la concevoir unique ou doit-on admettre qu’elle est multiple, que, par exemple, dès le refroidissement suffisant de la terre, le potentiel de vie a inauguré son organisation simultanément en plusieurs points de l’écorce terrestre d’après un modèle unique ou d’après plusieurs modèles ? Cette recherche est stérile : trop de notions nous échap-