Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/395

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de cette conséquence, et, qu’elle résulte ou non d’une analyse ultérieure, nous entendons nous maintenir, sans toucher aux termes précis où le débat doit s’engager, dans la stricte négation de l’infini.

Ainsi, dans le cours de la discussion, indivisibles, éléments, minimes ou ultimes grandeurs, seront pour nous synonymes. Ces termes désigneront des parties de même nature que le tout, mais dernières dans la décomposition du tout.

L’argument qu’il nous faut aborder le premier est le stade, parce qu’il est radical, et que, s’il est fondé, notre hypothèse se détruit en se posant. Vous tenez, nous dit-on, pour l’existence d’éléments ultimes ou d’indivisibles ; or certaines circonstances du mouvement prouvent, à n’en pas douter, que vos indivisibles se divisent. C’est la question préalable, avec ce qu’elle a de tranchant, opposée tout de suite à tout essai de preuve, à toute investigation ultérieure. Il est clair qu’une théorie, surprise dès le début et dans son énoncé même en flagrant délit de contradiction, n’a rien à tenter pour sa défense ; elle est condamnée.

Soit donc, au cas ou Zénon aurait vraiment visé le discontinu, et où il faudrait voir dans ses ὄγκοι des indivisibles de longueur, trois lignes droites horizontales formées d’éléments contigus :

a b c
a′ b′ c′
a″ b″ c″

Ces droites sont disposées de telle sorte que leurs éléments de même rang se trouvent sur une même verticale.

Supposons maintenant que la première demeure immobile, tandis que les deux autres se meuvent en sens contraire. Chacun de leurs éléments avancera d’un rang en un élément de durée ou instant[1]. Or voici ce qui va se passer.

En un instant, un élément déterminé de la troisième, le premier, par exemple, qui est a″, passera sous un élément unique de la première, et viendra se placer ainsi :

a b c
a″

Mais il passera nécessairement sous deux éléments différents de la seconde :

a b c
a′ b′ c′
a″

Comme d’ailleurs, ainsi qu’on le fait remarquer, ces deux rencontres sont naturellement successives, l’instant, indivisible par hypothèse, se trouve divisé en deux instants.

Suivons pas à pas cette argumentation et ne perdons pas de vue la donnée où l’on se place.

  1. Ces deux termes auront pour nous le même sens dans toute la suite de cet article.