Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/492

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exemple, vous objectez, contre l’emploi que j’ai fait du terme sensation (pour exprimer l’affection unie au moi et localisée dans un siège corporel), que toute sensation de cette espèce comprend nécessairement une partie représentative puisque, dites-vous, on sait quand on a ces sensations, on les reconnaît quand elles reviennent, etc., à la différence des affections purement intérieures qui ne se localisent et ne se reconnaissent point : d’où vous concluez que les premières ont un caractère représentatif et intuitif, ce qui vous détermine à continuer d’appliquer le mot générique intuition (et à présent perception). Mais si le caractère représentatif ou intuitif d’une espèce analogue de modifications consistait à savoir quand on l’éprouve et à la reconnaître quand elle revient, il s’ensuivrait que tout serait une représentation dans la sensibilité et l’intelligence humaine, et cependant en observant l’analogie du langage et la distinction des idées, on ne saurait dire que tant de modes intimes qui sont dans la conscience du moi sous une forme purement réflexive, aient ce caractère représentatif approprié seulement aux impressions et aux images qui s’offrent comme d’elles-mêmes dans une sorte de relief sensible. Je spécifierai donc toujours ainsi la représentation ou l’intuition à cette forme de coordination dans l’espace qui paraît exclusivement propre aux impressions de deux sens et que je crois indépendante de toute association ou opération active de l’esprit. J’en distinguerai soigneusement la perception, acte simple et indivisible du moi qui rapporte hors de lui sous cette forme les impressions et les images ; j’en distinguerai aussi les sensations ou modifications affectives, dont le moi se sépare encore dans son for intérieur en les localisant dans un siège organique sans les représenter. Il est impossible qu’un seul mot, tel que perception, sensation ou intuition, convienne également à tous ces phénomènes.

En appliquant la distinction précédente à toutes nos facultés passives et actives, nous verrions qu’il n’y a que celles-ci seules, proprement dites facultés ou puissances, dont les idées réflexives s’individualisent dans le sens intime et se distinguent ou se séparent de celles de leurs matériaux ou de leurs termes d’application. Voilà pourquoi aussi Condillac voulant tout dériver de la sensation transformée n’a réellement considéré que les facultés passives ou des modes de coordination dépendant de la nature des impressions, où la force sensitive opère organiquement et sans conscience, où aussi ses