Page:Revue de métaphysique et de morale - 26.djvu/386

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définir l’intelligence pure par la conséquence vraie, et si l’on en est sûr, est-on sûr alors que l’intelligence pure ne produise que des conséquences vraies ?

M. Goblot expose ensuite avec force le rôle social de la pensée logique. D’un point de vue génétique, rien sans doute n’est plus important. « Il est bien vrai que la nécessité logique est condition de la valeur universelle du jugement ; c’est précisément pourquoi elle est moyen, tandis que l’universalité est fin et raison d’être. On pourrait faire de cette nécessité le but unique de toute la logique, puisque ce qui est logiquement nécessaire vaut pour tous les esprits, et que ce qui n’est pas logiquement nécessaire peut toujours être contesté. Mais le besoin de pensées universellement valables a seul pu déterminer l’esprit humain à chercher la nécessité logique » (p. 39). M. Goblot va-t-il jusqu’à définir la nécessité logique, et plus généralement la pensée vraie, par l’universalité qu’elle conquiert ? Ce n’est pas très facile à décider ; il le semble parfois. « La pensée vraie est celle qui est susceptible de devenir la croyance commune de tous les esprits qui la comprennent, c’est-à-dire en qui elle a pénétré » (p. 38). Ce serait là une seconde manière de réduire la logique à la nature. Mais la phrase n’introduit-elle pas dans le verbe « comprendre » l’intelligence pure de tout à l’heure ? Si remarquable que soit pour le philosophe la force de la vérité, il ne semble pas que cette force seule permette de la définir. Il n’est pas bien clair que l’enchaînement logique soit définissable par l’enchaînement des pensées existantes, soit dans un même esprit, soit dans une foule[1].

Dans son analyse des formes logiques, M. Goblot est à la fois original et fidèle à la tradition. Comme M. Lachelier dans sa théorie du syllogisme, il veut animer la tradition de pénétration psychologique ; il veut l’animer, mais en somme il la suit.

M. Goblot n’admet pas qu’un jugement puisse affirmer une relation ; voici la raison générale qu’il en donne : « Si le jugement est, en tous cas, une assertion, il y a quelque chose qui est affirmé ou nié, et c’est l’attribut, et quelque chose de quoi il est affirmé ou nié, et c’est le sujet, et enfin la convenance ou disconvenance de cet attribut à ce sujet, et c’est la copule » (p. 186). Peut-être cela manque-t-il d’évidence. Tout jugement a quelque sujet ; d’accord.

  1. Je ne dis rien ici de l’objection que l’enchainement logique est trop fondamental pour être strictement définissable sans cercle.