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RÉPUBLIQUE HELVÉTIQUE.

former une idée. On verra des hommes tout aussi bien équipés, organisés et instruits, que les meilleurs soldats des autres pays de l’Europe.

Dans les guerres de l’Amérique du Nord, ce sont des milices qui battirent les troupes anglaises, et firent prisonnière l’armée entière du général Burgoyne, à Saratoga. Ce fut aussi à des milices que le corps du général Dupont, fort de 20,000 hommes, se vit obligé de se rendre en Espagne (les troupes anglaises n’y étaient pas encore) ; et certes ni les Américains ni les Espagnols n’étaient organisés comme le sont aujourd’hui les Suisses, qui, dans vingt-quatre heures, peuvent être mis en pleine activité de service. En conséquence, admettons qu’il y ait seulement 90,000 Suisses sous les armes : on conviendra que, pour les attaquer, il faudrait bien 90,000 hommes de troupes étrangères ; il faudrait encore un bon tiers en sus pour garder le pays à mesure qu’on avancerait, et ce nombre n’est pas exagéré, puisqu’on aurait à contenir une population toute militaire.

Ainsi la simple invasion de la Suisse, avant de parvenir au but qu’on se proposerait, c’est-à-dire, d’arriver à l’ennemi, exigerait au moins 120 à 130,000 hommes.

Mais ce n’est pas tout : la Suisse, outre ses contingens fédéraux, possède les réserves cantonales, dont le nombre n’est pas fixé. Si cependant nous en jugeons par quelques cantons qui nous sont connus, on ne peut évaluer à moins de six hommes sur cent le nombre des individus valides, âgés de moins de 45 ans ; ce qui fait bien, non compris le contingent, 120,000 hommes, qui ont presque tous passé par les contingens, et sont, comme eux, armés, équipés et organisés. Viennent ensuite les hommes qui ont achevé leur temps dans les réserves : le nombre en est encore inconnu ; mais la plupart, âgés de 45 à 60 ans, seraient prêts à combattre pour leurs familles et leurs propriétés. La Suisse est un pays pacifique par nature, mais il ne faut pas oublier que tout homme y est soldat et