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RUSSIE.

La cession de Poti livre aux Russes, avec la libre navigation du Phase, le moyen de transporter en Iméréthie les vivres nécessaires à leurs troupes ; et celle d’Akhaltzik assure la soumission de la Mingrélie et du Gouriel. L’influence de la Turquie sur ces contrées est donc effacée pour toujours.

Si l’on nous demande quel est le droit de la Russie à la possession de ces provinces, notre réponse sera facile : c’est le droit du plus habile et du plus fort. Chacune ayant été acquise séparément et à titres divers, nous nous contenterons de citer quelques exemples. Sous le règne de Catherine ii, le roi de Géorgie, Héraclius, menacé par la Perse et la Turquie, réclame l’alliance des Russes qui occupent aussitôt sa capitale, Tiflis. Mais des rixes s’étant élevées dans les rues entre les soldats des deux nations, les Russes, à la prière d’Héraclius, se replient sur la ligne du Caucase. Quelques années plus tard, les Persans envahissent la Géorgie pour punir Héraclius de ses liaisons avec Catherine. Nouvelle demande de secours de la part du prince : mais cette fois, les bataillons russes assistent paisiblement du haut du Caucase aux désastres de leurs alliés. Héraclius est écrasé, Tiflis mise à feu et à sang, les habitans traînés en esclavage, et c’est alors seulement que le général Zouboff vient lentement reprendre les ruines de Tiflis, ravager le Daghestan, puis se retire encore, laissant les faibles sujets d’Héraclius en butte aux invasions des Persans et des montagnards. Une telle conduite était habilement calculée pour rendre pesante aux Géorgiens leur indépendance nationale. On décida quelques-uns de leurs seigneurs à troquer cette misérable indépendance contre le joug de la Russie ; en 1800, le prince George remit officiellement son sceptre aux mains de Paul ier, et les Russes s’établirent sur les cendres des villes géorgiennes, non sans une assez vive résistance.

Voilà pour la conquête de la Géorgie : le même système d’envahissement progressif a réuni à ce royaume les khanats,