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ANCIEN EMPIRE MOGOL.

trouvaient furent égorgés, et leurs têtes envoyées au roi. Pour prévenir le retour de semblables révoltes, on suspendit aux arbres qui bordaient les grandes routes du voisinage dix mille corps avec la tête en bas, et Djihân-Guir observe que, malgré tant d’exécutions sanguinaires, le nombre des rebelles et des mécontens ne diminuait point. Il ajoute qu’il est à peine une province dans l’empire, où, soit par les ordres de son père, soit par les siens, les musulmans n’aient fait périr cinq ou six cent mille Indous, victimes de ce penchant funeste, qui les portait à la désobéissance et à la révolte.

L’empereur remonta ensuite la Djemna, dans une flottille de bateaux, pour se rendre à Cachemire. Son fils, le sultan Khourrèm, lui demanda la permission de visiter Lahour et vint au bout de dix jours rejoindre le camp de son père, à Hassan Abdul. Après une forte pluie, ils se mirent en marche pour Kalanour ; mais la rivière se trouva si gonflée, que le roi donna l’ordre d’attendre que les eaux fussent baissées. Une foule d’insensés ne tinrent aucun compte de cet ordre prudent, et se précipitèrent avec les éléphans et les chevaux dans le courant. Le jeune fils de Mirza Roustèm, favori du roi, se noya, et le lendemain on compta qu’il avait péri près de dix mille éléphans, chameaux ou chevaux, et cinquante mille hommes.

Après s’être livré pendant un mois au plaisir de la chasse dans les plaines de safran de Cachemire, Djihân-Guir reprit la route de Lahour. Il reçut avis, chemin faisant, que les naturels de Kaboul recommençaient à infester les routes, et commettaient toutes sortes de violences contre leurs voisins. Il donna à Méhâbèt l’ordre de se porter en force sur le théâtre de ces brigandages, et d’en punir les auteurs…

Ici se termine la relation de Djihân-Guir. Il est douteux que ce prince l’ait poussée plus loin. L’intérêt qu’elle présente nous fait vivement regretter qu’il ne l’ait pas continuée.