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PÉROU.

prétextes que le général Bolivar essaie de fomenter la haine entre la Colombie et le Pérou ; car il voudrait établir à leur préjudice un pouvoir absolu, dont le Pérou s’est enfin délivré…

Nous souffrîmes avec une héroïque patience l’occupation de forces étrangères inutilement coûteuses, qui maintinrent le général Bolivar sur notre territoire sans le consentement de la nation. Le congrès provisoire de l’année 1825 ne demanda pas à la Colombie une armée auxiliaire ; mais il vota seulement la continuation du séjour de Bolivar, espérant, d’après les apparences et la bonne foi qu’on lui croyait, qu’il établirait graduellement un système libéral, qui se terminerait par l’observation complète de la constitution…

Lorsque la puissance des factions et les fureurs de l’anarchie exigèrent la présence du général Bolivar en Colombie, il quitta le Pérou sans amener avec lui, comme il le devait, les troupes auxiliaires. Celles-ci, ayant résolu de ne pas demeurer indifférentes aux dissensions de leur pays, tentèrent un soulèvement qu’excuse l’amour de la patrie, si la discipline militaire le condamne. Des soldats qui avaient versé leur sang pour la liberté et juré de défendre ses institutions, les voyant à la veille d’être détruites chez eux, se laissèrent entraîner à cette impulsion patriotique qui leur avait fait braver tant de périls sur les champs de bataille ; ils suivirent le même exemple que leurs compagnons d’armes en Colombie qui prirent part à une si noble lutte, et opérèrent une révolution que leurs chefs ne purent ni prévoir ni empêcher. Quelles séductions ou quels encouragemens aurait pu employer le Pérou envers des soldats dont le but était l’honneur et la gloire, et qui, en agissant autrement, auraient cru flétrir leurs lauriers et perdre à jamais leur réputation[1] ? L’insurrec-

  1. Les phrases en caractères italiques indiquent les passages extraits du manifeste de Bolivar.