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ARCHIVES HISTORIQUES.

d’autres cheïkhs et Grands se rendirent à Djizé. Le chef de l’armée française les reçut, leur sourit et leur demanda : « Êtes-vous les grands cheïkhs ? » Ils répondirent : « Les grands cheïkhs ont eu peur et se sont sauvés. » Il demanda : « Et que craignaient-ils ? Écrivez-leur de paraître. Nous composerons un conseil pour assurer la tranquillité de la ville et le cours de la justice.»

Ces assurances calmèrent les inquiétudes des cheïkhs qui revinrent presque tous dans la ville. Bonaparte y fit son entrée deux jours après. « Lorsque le Grand des Français, dit notre auteur, entra et s’établit dans le quartier d’Esbèkié, la majeure partie de son armée resta sur l’autre rive. Il n’entra avec lui au Caire que peu de soldats. Ils marchaient dans les rues sans armes et n’inquiétaient personne ; ils riaient avec le peuple et achetaient ce dont ils avaient besoin, à un très-haut prix, tellement qu’ils donnaient six francs pour une poule, et pour un œuf dix sous, payant d’après le prix que ces choses coûtent dans leur pays. Le peuple eut de la confiance en eux, leur vendit de petits pains et toute sorte de vivres. » On ouvrit les boutiques ; mais selon Abdurrahaman lui-même, les soldats français n’eurent pas toujours à se louer de la probité de ces marchands égyptiens. » Non contens de faire des pains plus petits, les boulangers, dit-il, mêlèrent la farine avec de la terre. » Quelquefois l’écrivain s’amuse à décocher quelque trait sur nos troupes, auxquelles il reproche un penchant trop vif pour les plaisirs. « Les gens sensés des arts