Page:Revue des Deux Mondes - 1830 - tome 1.djvu/365

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
357
VOYAGE AUTOUR DU MONDE.

du sol, sont, ou une terre de bruyère sèche, formée par la décomposition des radicules des empetrum et des vaccinium des coteaux, tandis que la seconde, due à la décomposition des mousses, des fougères est grasse et marécageuse. La vraie terre végétale n’existe nulle part.

La végétation des Malouines est on ne peut plus intéressante pour le botaniste sans doute ; mais ces caractères qui la distinguent ont aussi pour les yeux les plus étrangers aux mystères de Flore, une nouveauté dont on aime à se rendre compte. Sous le ciel de la France, en effet, nos prairies émaillées, nos peupliers, reflétant leur mobile feuillage sur des eaux paisibles, des bois de haute-futaie, dont le chêne ou le hêtre sont les robustes enfans, forment un type de l’Europe tempérée, auquel nous rapportons toutes nos idées conventionnelles sur les paysages. Au Brésil, cette nature est tout autre. Ce sont de larges masses verdoyantes, entassant plantes sur plantes, fleurs sur fleurs ; c’est, en un mot, un océan de feuillages qui ne se dépouille jamais, tout en prenant des proportions viriles et majestueuses, et rarement les formes humides des herbes. Aux Malouines, la scène est différente. D’immenses prairies semblent avoir été tondues au ciseau ; pas un végétal ne s’élève au-dessus de son voisin ; ils se pressent, ils s’enlacent, mais il faut chercher chacun d’eux ; les fleurs se cachent sous les feuilles, comme si elles avaient appris à redouter l’impétuosité des vents de ces régions, et toutes ces herbes forment un lacis serré et inextri-