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VOYAGE À TEMBOCTOU.

trident à manche de bois, dont ils se servent avec beaucoup d’adresse. J’ai vu une espèce de poisson assez semblable à la carpe, qu’ils sèchent et fument pour le vendre à leurs voisins et aux voyageurs qui traversent le pays. Bouré se trouve à cinq journées en descendant la rivière en pirogue. C’est un pays montagneux contenant plusieurs mines d’or très-riches s’il faut s’en rapporter au récit que me firent les habitans.

« Accompagné par mon guide, j’allai faire une visite au chef qui est, à ce qu’on m’assura, un guerrier redouté de ses voisins. Nous le trouvâmes seul dans sa hutte que décoraient des arcs, des carquois, et des dards appendus aux murs. Il nous fit asseoir sur une peau de bœuf. Comme on peut le croire, il fut question de moi, et il promit que je traverserais la rivière le lendemain. Les voyageurs sont passés par ses esclaves, et dans cette circonstance, on lui paie un droit en marchandises d’Europe, telles que poudre à canon, tabac, couteaux, ciseaux, etc. Il me dit que, vu ma qualité de chérif, il me permettrait de passer sans payer de droit. Ce chef, d’une physionomie douce et même agréable, avait environ cinquante ans.

« La nourriture ordinaire des habitans, est du riz à l’eau, sans sel, avec une sauce de poisson sec pilé. Ils mangent aussi du poisson frais. Ils cueillent des fruits de cès dont ils obtiennent une espèce de beurre ; j’en vis plusieurs tas exposés à la pluie, et qui commençaient à germer.