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ARCHIVES GÉOGRAPHIQUES.

obligé de partager ce peu avec ceux dont il s’était servi pour exécuter ce crime. Un maure de Tafilet, appartenant à la caravane, eut pour sa part un sextant qu’on pourrait encore, m’a-t-on dit, trouver dans le pays ; quant aux papiers et journaux, ils furent répartis parmi les habitans du désert. Pendant mon séjour à Ghourland, village du Tafilet, je vis une boussole de poche, de fabrique anglaise ; personne ne put me dire d’où venait cet instrument, et je présumais qu’il avait appartenu à Laing. Sans les précautions que j’étais obligé de prendre sous mon costume arabe, j’aurais offert un prix bien élevé pour cet objet ; mais je me serais trahi moi-même si j’avais paru attacher la moindre valeur à un instrument dont j’étais censé ignorer l’usage. »

Le 4 mai 1828, M. Caillié partit de Temboctou avec une caravane, et traversa le désert de Sahara. « Le matin du 9, dit-il, avant le lever du soleil, les maures qui m’accompagnaient me montrèrent l’endroit où le major Laing avait été assassiné. Je reconnus, au même lieu, la place d’un camp, et je détournai les yeux avec horreur, versant en secret une larme, seul tribut que je pouvais rendre à la mémoire d’un voyageur dont aucun monument n’indiquera la tombe. Plusieurs maures de notre caravane, qui avaient été témoins de ce funeste événement, me dirent que Laing avait fort peu d’objets lorsqu’il fut arrêté par le cheïkh, et qu’il avait offert cinq cents piastres à un maure pour le conduire à Souyerah (Mogador), ce que celui-ci