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HISTOIRE.

après un combat sanglant, laissant dix mille hommes sur le champ de bataille. Il s’était défendu avec une valeur désespérée, entouré par un ennemi supérieur en nombre qui enveloppait de tous côtés ses derniers défenseurs. Cependant, lorsqu’il arriva à son château, son épouse, fille du Rana d’Ordipour, en fit fermer les portes et refusa de le recevoir, indignée de sa lâcheté.

« Lorsqu’elle apprit ce qui s’était passé, dit un auteur qui raconte le fait, au lieu d’envoyer au devant de son époux quelqu’un pour le consoler, elle s’écria que ce n’était point son mari, et défendit de le laisser pénétrer dans la forteresse, ajoutant que le gendre d’un Rana n’aurait point oublié que son devoir était de vaincre ou de mourir. Peu de temps après, elle fit dresser son bûcher, et dit qu’on l’avait trompée, que son époux devait être mort, et que son devoir à elle-même était de se brûler. Elle ne quitta cette résolution que pour accabler Jesswunt-Sing de reproches, et passa neuf jours entiers dans des alternatives de fureur et d’abattement, dont elle ne sortit que lorsque sa mère fut parvenue à la calmer en l’assurant que son mari, à la tête d’une nouvelle armée, allait de nouveau tenter le sort des combats et réparer son honneur. »

Cet héroïsme des femmes n’est pas chez elles une vaine théorie. L’épouse du rajah aurait agi, si la circonstance l’eût exigé, avec autant de fermeté qu’il paraissait y en avoir dans ses sentimens. Lors-