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SAINT LOUIS EN AFRIQUE.

régner dans les idées, il est aisé de voir que tout y révèle une création européenne. Il y a trop d’art dans la composition, trop de pureté classique dans le langage : ce n’est pas ainsi qu’écrit un poète arabe, et surtout un poète algérien. Voici quelques précieux fragmens conservés jusqu’à nos jours des chants populaires que les croisades inspirèrent à l’Orient. Ils se rapportent aux deux expéditions de saint Louis en Afrique. C’était alors une des grandes époques de l’islamisme ; rien cependant n’y fait soupçonner la moindre ressemblance avec l’hymne tout pindarique qu’on veut attribuer aujourd’hui au Tyrtée mauritanien.

P. M. directeur.
I.

Louis ix ayant été fait prisonnier à la funeste bataille de Mansoura, son manteau royal tomba entre les mains des Musulmans. Le sultan victorieux (Touran-Schah) adressa une lettre au vice-roi de Damas pour l’informer de son triomphe. Cette lettre lui fut envoyée avec le manteau de saint Louis. Il était d’écarlate, disent les historiens arabes, et fourré d’hermine. Le vice-roi revêtit le manteau, et on composa à cette occasion les vers suivans :

« Chose étrange ! l’habit du roi de France, qui désirait ardemment de se trouver sur les épaules du prince des émirs (le sultan),