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LA GRÈCE EN 1829.

la conçois ; ainsi cette armée doit, à mes yeux, être peu nombreuse : l’état du pays le réclame du reste impérieusement, car l’entretien d’une armée est une chose impossible par le peu de ressources dont il dispose. Il a besoin, avant tout, d’ordre, de paix et de travail ; s’ils ne lui sont promptement rendus, la misère en aura bientôt fait un désert. Je ne pense pas maintenant qu’il y ait une seule personne raisonnable qui veuille mettre en balance l’intérêt des Rouméliotes qui se trouvent dans l’armée irrégulière avec un intérêt aussi pressant. S’il en était encore qui éprouvassent de l’inquiétude sur le sort de tous ces hommes compromis aujourd’hui vis-à-vis des Turcs, quelques observations fort simples suffiraient pour les convaincre : on leur répéterait encore qu’il ne s’agit pas de les sacrifier, que la Grèce, constituée par les trois puissances, sera dans tous les cas bien assez vaste pour leur offrir un asile et des terres à cultiver ; que ceux qui voudront y prendre droit de bourgeoisie, sous la condition de se livrer au travail et de devenir des hommes utiles au lieu d’être des bandits, sont sûrs d’y trouver protection ; que ceux qui ne voudraient point accepter ces conditions sont tout-à-fait indignes qu’on leur porte le moindre intérêt, et que s’ils s’obstinent à guerroyer avec les Turcs, libre à eux de le faire, mais qu’ils ne peuvent exiger que la nation se sacrifie pour satisfaire leurs caprices ; enfin que ce serait le comble de la déraison d’écouter leurs prétentions ridicules, qui ne tendent à rien moins qu’à enlever aux Turcs toute province qui a fourni un