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HISTOIRE — PHILOSOPHIE.

d’en tirer le simple nécessaire, et n’ont nullement songé à l’amélioration ou à l’embellissement de leurs propriétés. La nature semble avoir plus fait pour le Haut-Canada que pour toute autre contrée du globe. Elle l’a doté d’un terroir d’une grande richesse et d’un climat rigoureux, il est vrai, mais aussi favorable à la constitution humaine qu’à la production de toute espèce de céréales et de fruits. Les Européens commencent enfin à se défaire de leurs préjugés contre ce beau pays, qu’ils comparaient, sans le connaître, aux déserts de la Sibérie ; et ses avantages sont actuellement si bien appréciés des habitans de la Grande-Bretagne et de l’Irlande, qu’on peut sans exagérer porter à huit ou dix mille le nombre de ceux qui viennent s’y établir tous les ans. L’émigration des États-Unis y est aussi fort considérable. Cette partie du Canada ne renferme rien d’intéressant pour le voyageur, si l’on en excepte la cataracte de Niagara, et un petit nombre d’autres curiosités naturelles. Il n’y rencontre qu’une forêt sans fin, repaire des bêtes fauves, quelques huttes en bois, éparses çà et là et de l’aspect le plus lugubre, des champs mal cultivés, et des routes construites avec des troncs d’arbres de neuf pouces à deux pieds de diamètre, jetés en travers, et si irrégulièrement disposés, qu’elles sont impraticables pour les voitures voire même pour les chevaux et les bestiaux.

Le Haut-Canada toutefois s’accroît rapidement en richesses et en importance. Désert il y a environ trente ans, il renferme aujourd’hui près de deux cent mille habitans, qui possèdent des propriétés imposables pour une valeur de 2,000.000 liv. sterling[1]. Quoique la population

  1. On y comptait, en 1829, 1,000,000 d’acres de terres cultivées,