Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1831 - tome 2.djvu/112

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
102
LITTÉRATURE ÉTRANGÈRE.

sur une pique garnie d’argent. Mais bientôt le Sud vomit d’affreux nuages ou de nouvelles masses de barbares : « Les vents, fils de Stribog, lancent du côté de la mer des nuées de flèches sur les intrépides bataillons d’Igor. » Cependant Vsiévolod est en avant avec sa garde fidèle. « Les ennemis sont accablés de ses traits ; leurs casques retentissent sous les coups répétés de son glaive, et des monceaux de Polovtsi ont mordu la poussière partout où a brillé le casque d’or du prince. » Igor vole au secours de son frère : depuis deux jours, la bataille la plus terrible, la plus acharnée, se prolonge. « La terre est teinte de sang et jonchée de cadavres. À la troisième aurore, les drapeaux russes s’abaissent devant l’ennemi, faute de sang à verser. Les vaincus terminent leur banquet sanglant et meurent pour la patrie après avoir vendu chèrement leur vie. » Kief, Tchernigof sont dans l’effroi ; les Polovtsi triomphans emmènent Igor en esclavage. « On entend sur les rivages de la mer azurée les chants de leurs vierges qui font sonner l’or enlevé aux Russes. » L’auteur s’adresse ensuite à tous les princes, et les engage à se coaliser pour tirer vengeance des Polovtsi. Il dit à l’un : « Tu peux épuiser le Volga par le mouvement des rames de tes nombreux vaisseaux, et tarir les eaux du Don en les puisant dans les casques de tes compagnons d’armes. » À un autre : « Vos casques dorés sont depuis long-temps teints de sang ; vos héros sont furieux ainsi que des taureaux féroces blessés par un fer brûlant. Déjà les Lithuaniens, les Yatviagues et les Polovtsi jettent leurs lances à vos pieds, et courbent leurs têtes devant leurs pesans cimeterres. » Au prince Yaroslaf de Galitch : « Du haut de ton trône d’or, tu soutiens les monts Krapaks par tes légions de fer ; tu peux fermer les portes du Danube, ouvrir le chemin de Kief, et lancer tes flèches jusque dans les contrées les plus éloignées. » S’il déplore la mort du prince Polotsk, voici comment il s’exprime : « Ô prince ! des oiseaux de proie ont couvert ta garde de leurs ailes, et les bêtes féroces ont léché le sang de tes guerriers ; toi-même,