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VOYAGES.

récit des ruses employées pour vaincre les sauvages, ou pour s’en faire redouter en leur imprimant une sainte terreur. C’est ainsi qu’on vous raconte comment le hardi Bartholomeu Buenno, pour découvrir de nouveaux trésors, menaçait les simples habitans de Goyaz d’incendier les lacs et les rivières de cette immense contrée, en brûlant un peu d’eau-de-vie dans un vase d’étain. On vous dit encore la terreur avec laquelle ces pauvres sauvages voyaient déjà la flamme bleuâtre s’élançant, par un pouvoir mystérieux, au-dessus des vagues, et voltigeant sur elles, jusqu’à ce qu’une vallée de sable remplaçât un lac aux bords enchantés.

On comprend que tous ces contes, qui pouvaient bien entraîner des imaginations enthousiastes, et faire faire des découvertes, n’avançaient guère les Européens dans la connaissance topographique du pays[1]. On était obligé de s’en tenir aux anciennes relations ; elles contenaient, il faut en convenir, bien peu de notions positives sur l’état physique de la contrée.

Enfin arrivèrent les guerres de la Hollande, et l’on vit paraître deux grands ouvrages qui, pendant bien long-temps, servirent de guide à ceux qui eurent à parler du Brésil. Leur influence devint d’autant plus universelle, qu’ils furent composés en latin. Je veux parler de l’Histoire naturelle de Pison et Margraff (1648), et de l’Histoire contemporaine de Barlœus (1647). Ces deux ouvrages, écrits avec conscience, mais se bornant, l’un à la botanique et à la zoologie du Brésil, l’autre au récit d’une conquête, ne purent répandre

  1. Cela est si vrai que Buenno, dont nous venons de parler, erra pendant plusieurs années dans les forêts pour retrouver les contrées découvertes par son père.