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SOUVENIRS DE GRÈCE.

demeures, et de s’abriter sous leurs débris. Un peu plus loin, au bazar, se trouvait une douzaine d’échoppes enfumées occupées par des Turcs ; elles étaient garnies de selles, de mors, de brides, de vieilles armes et de quelques comestibles.

À peu de distance du bazar, une petite maison triste et assez obscure est seule restée debout ; c’est là que le bey a établi sa demeure. Nous nous y rendîmes de suite pour demander la permission de visiter la ville ; il était parti la veille pour Négrepont, résidence habituelle d’Omer pacha, son beau-père. Son caïmacan nous reçut fort bien, nous fit asseoir sur son divan, et (suprême honneur dont je me serais volontiers passé) daigna m’offrir le tchibouk qu’il fumait lui-même. Je lui adressai la parole en turc ; il nous répondit, à notre grand étonnement, qu’il n’entendait pas cette langue, et que, né en Grèce, il ne comprenait que le grec. Ses stupides satellites, rangés au fond de l’appartement, fixaient sur nous des yeux de stupéfaction, concevant difficilement que des infidèles fussent assis sans plus de cérémonie aux côtés de leur maître. Après avoir causé quelque temps sur les rapports de la Grèce et de la Turquie, nous prîmes congé du caïmacan, qui voulut bien nous donner une escorte pour parcourir Athènes.

On se ferait difficilement une idée des difficultés qui retardaient notre marche au milieu des décombres ; mais leur aspect nous engageait plus vivement encore à hâter le pas pour nous assurer de l’état dans lequel se trouvaient les chefs-d’œuvre de l’architecture antique. Le premier monument que nous rencontrâmes nous inspira les craintes les plus vives sur le sort des autres. L’une des colonnes de cette élégante et gracieuse construction de Lysicrates, dont la frêle archi-