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JÉRUSALEM.

L’intérieur de cet édifice, comme celui des mosquées en général, réunit la grandeur à la simplicité ; il inspire le recueillement, si propre à la nature du culte musulman, qui est grave, silencieux et sans ostentation : la prière, chez ces peuples, paraît être plutôt l’expression d’un sentiment que l’accomplissement d’un devoir. L’Arabe descend de son chameau au milieu du désert ; le Turc s’arrête sur la place publique pour prier, sans attirer ni l’attention ni la curiosité : l’impiété, dans ce pays, serait un scandale, sans que la ferveur y devînt pour cela un mérite ; il suffit d’avoir passé quelques heures dans une mosquée pour s’en convaincre. Le silence y règne ainsi que le recueillement ; il n’est interrompu ni par des chants, ni par des quêtes, ni par le bruit des chaises ou des conversations particulières. Quelques versets du Koran sur la puissance de Dieu, sur la résignation dans le malheur, ou les devoirs de la charité, sont les seuls ornemens des murs. Mais de toutes les mosquées que nous avons vues, il n’en est aucune d’aussi intéressante que celle-ci : il y a quelque chose de singulier, de mystérieux dans cette roche grossière, entourée de portiques de marbre, de grilles dorées, de tapis de soie, et vénérée depuis tant de siècles : richesse, élégance, grandeur, tout est réuni dans ce curieux monument. Lorsque nous en sortîmes, la lune apparaissant au milieu des nuages éclaira toute l’enceinte, et nous fit voir l’ensemble des bâtimens de la mosquée, les arcades des oratoires, mêlées à des groupes d’arbres, et projetant de larges ombres sur les marbres des parvis. On aurait pu se croire au milieu de ces demeures enchantées décrites dans les contes arabes. Ce prestige ne dura pour nous qu’un moment, car notre guide, saisi tout à coup