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MORT DU CALIGULA.

ne peut mourir ainsi à vingt-neuf ans ; lui qui nous a donné dans le cirque tant de beaux lions, de si furieux tigres et de si fameux rhinocéros ! Oh ! par la divinité d’Auguste, mes yeux se dessécheraient.

Second citoyen. Un si libéral Auguste, qui fait tant de largesses au peuple, et ne laisse point les pauvres de Rome manquer de blé ! Qui aurait tenté un pareil coup ?

Une femme. Par la bonne déesse ! lui qui nous donne de si belles fêtes tous les jours ! Je ne le crois pas.

La mère. Ne disais-je pas que tout ce sang versé était d’un funeste augure ?

Un affranchi, à un ancien esclave son contubernal. Si ce qu’on dit est vrai, le bon temps est passé.

L’esclave. Tu dis vrai. Il était bien agréable de pouvoir dénoncer son maître pour gagner à la fois sa liberté et le huitième des biens confisqués.

Bativius, à Clivius. Entends-tu ce qu’on dit ici près ?

Clivius. Je suis tout oreilles. Mais gardons de laisser voir nos sentimens. Si ce peuple s’émeut, il n’y fera pas bon.

Bativius. D’ailleurs je tremble qu’il n’en soit rien. Le coup peut être manqué, et tout cela n’être qu’une fausse alerte.

L’affranchi, à l’esclave. Connais-tu ces deux sénateurs qui ont toujours parlé bas entre eux ? Le plus grand est, je crois, le consulaire Clivius. Si la nouvelle est fausse, malheur à lui. Je le couche sur mes tablettes avec un signe rouge. Nous prouverons par témoin qu’il a eu l’air joyeux.

Bativius. Veille sur toi, Clivius : il y a ici près des oiseaux qui guettent leur proie.

Une voix. On dit là-bas que César est en effet blessé ; mais, grâce aux dieux immortels, il vit, et l’on panse ses blessures.

L’affranchi, haut, en regardant effrontément le sénateur Clivius. Que tous les dieux nous conservent sa précieuse vie !

Un grand nombre de voix à la fois. Que les dieux gardent César !

L’affranchi poursuit en regardant Bativius. Ne craignez rien, Ro-