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MOEURS DES BRIGANDS ARABES.

cette déclaration : « Nous avons mangé du sel dans telle ou telle tente, » est pour eux un passe-port qui les préserve de tout danger pendant leur voyage ; ou bien, à tout événement, le témoignage de leur hôte pourrait les délivrer des mains de toute espèce d’Arabes, soit qu’ils appartiennent à sa propre tribu, ou à quelque autre tribu amie. Mais si les haramys après avoir reçu de leur protecteur les soins de l’hospitalité, avaient, en retournant chez eux, la bassesse de voler quelque autre Arabe de la tribu ennemie, ils seraient regardés comme ayant forfait au privilége du dakhil. La personne volée s’adresse à leur hôte, qui expédie sur-le-champ un messager au cheikh de la tribu à laquelle appartiennent les voleurs, pour réclamer les objets volés contre les lois de la justice et de l’honneur. Si les haramys restituent, l’affaire n’a pas de suites ; s’ils s’y refusent, leur hôte s’avance lui-même au-devant d’eux, portant avec lui le plat de cuivre dans lequel ils ont mangé lorsqu’il leur donna l’hospitalité. Dès qu’il est arrivé à la tente du cheikh des brigands, toute la tribu est sur-le-champ convoquée. Alors il dit aux haramys : « Voici le plat dans lequel vous avez mangé (c’est la preuve de la protection que je vous ai accordée au jour du danger) ; en conséquence rendez le bétail que vous avez volé. » S’ils obéissent, l’affaire se termine amicalement ; mais s’ils s’obstinent dans leur refus, l’Arabe élève en l’air le plat (appelé makarah), et leur dit devant tout le monde : « Vous êtes des traîtres, et vous serez partout dénoncés comme tels. » Cette déclaration produit les mêmes effets que le boag, dont nous avons parlé plus haut.

À la conclusion de la paix entre deux tribus, toute espèce de dettes contractées, des deux côtés, par suite de trahison, est exigible même après la paix, les effets du boag ne cessant jamais que le prix convenu ne soit complètement acquitté.

La réception que l’on fait au dakhil est volontaire, mais l’on ne peut que rarement s’en affranchir. Les Arabes disent