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RÉVOLUTIONS DU BRÉSIL.

et plus de zèle, il aurait pu fonder sur des bases solides un empire libre et florissant.

Don Pedro entrant à peine dans la vie, étranger aux affaires, sans connaissance des hommes et des choses, sans aucune instruction, sans un ami sincère et éclairé, à peu près sans guide, se trouva à la tête d’un empire qui ne le cède en étendue qu’à la Russie, à la Chine et aux États britanniques ; d’un empire qui n’était point encore constitué, que l’on connaissait mal, et dont la population hétérogène présente, suivant les provinces, des différences plus sensibles qu’il n’en existe entre la France et l’Angleterre, l’Allemagne et l’Italie. Ce prince avait pour lui les avantages de la jeunesse, une grande force physique, de la droiture, de nobles sentimens, le désir sincère de faire le bien. C’était beaucoup sans doute ; mais, dans les circonstances épineuses où il se trouvait, ce n’était point assez. Il fallait s’occuper de donner au Brésil une forme de gouvernement nouvelle ; cette tâche aurait embarrassé un homme plus consommé dans les affaires que ne l’était le fils du roi Jean vi.

Après avoir porté les titres de prince régent et de défenseur du Brésil, don Pedro fut proclamé empereur constitutionnel. Alors il n’y avait point encore de constitution ; mais les députés des diverses provinces, réunis à Rio de Janeiro, travaillèrent à ce grand œuvre. Cependant une assez forte tendance au républicanisme ne tarda pas à se manifester parmi les représentans ; don Pedro conçut des craintes pour son autorité, et tout à coup il renvoya l’assemblée constituante, en exilant quelques membres remarquables par leurs talens et par leur éloquence. Ce coup d’état était audacieux, et, par l’étourdissement qu’il occasionna, il accrut un moment le pouvoir de l’empereur. Mais pour mettre à profit les résultats d’un tel acte de vigueur, il fallait une constance et une habileté qui ne pouvaient être le partage d’un souverain si jeune encore ; la dissolution de l’assemblée constituante ne servit peut-être, en dernière analyse, qu’à rendre l’empereur un peu moins populaire. Don Pedro avait annoncé