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EXCURSIONS DANS LE VENEZUELA.

trouve difficilement sa route d’une ferme à l’autre. Ces fermes sont situées environ à un jour de distance l’une de l’autre, pour donner assez de pâturages à leurs troupeaux, afin qu’ils ne se confondent pas avec d’autres ; les habitans se guident sur des palmiers qui s’élèvent de loin en loin et forment des espèces d’îles dans cet océan. On ne vous fait d’autre cérémonie, quand vous arrivez à une de ces fermes, que de vous adresser le salut habituel Ave Maria purissima. Votre cheval est désellé et mis en liberté, et on s’inquiète peu qu’il s’égare ou non ; car il y en a toujours à portée une grande quantité, qui est considérée comme propriété publique. On vous donne de l’eau pour vous laver les pieds, et chacun, étendant son manteau et sa couverture à l’ombre, se couche en appuyant sa tête sur sa selle, en guise d’oreiller. »

La manière de traire les vaches dans ces fermes est assez singulière.

« Comme elles sont entièrement sauvages, les fermiers attendent qu’elles aient vêlé ; ils amènent à leur ferme tous les vaux qui sont dans les environs, et les vaches les suivent. Au moment où le veau tête, on s’approche de sa mère, et en lui passant une corde à une des jambes de devant, on peut la traire en toute sûreté. Il y en a cependant qui ne se prêtent pas à cette mesure. On a recours alors à un autre moyen qui réussit parfaitement. On leur jette un lazo autour du cou, et passant l’extrémité au-dessus des branches fourchues d’un arbre, qu’on laisse toujours debout à cet usage, on la hisse jusqu’à ce que les pieds de derrière touchent à peine la terre. ».

Quand les Llaneros veulent se procurer des chevaux, ils poussent ensemble une horde de chucaros, et chaque homme qui a besoin d’un cheval, choisit celui qu’il préfère, et le prend avec son lazo. Deux hommes tiennent fortement cette lanière jusqu’à ce que le cheval tombe presque étranglé par ce licou, qu’il resserre de plus en plus à mesure que ses efforts pour s’échapper sont plus grands ; alors on lui assène sur la tête quelques vigoureux coups de bâton qui achèvent de l’étourdir. Dès qu’il est insensible, on lui attache les jambes, on lui