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fond écouter une parole secrète, et puis, l’œil fixé sur le couchant, tout-à-coup ils chantaient une aurore invisible et un jour qui ne finit jamais. Où sont-ils, etc., etc.

Entraînés pêle-mêle, jeunes, vieux, tous disparaissaient, tels que le vaisseau que chasse la tempête ; on compterait plutôt les sables de la mer que le nombre de ceux qui se hâtaient de passer. Où sont-ils, etc., etc.

Ceux qui les virent ont raconté qu’une grande tristesse était dans leur cœur ; l’angoisse soulevait leur poitrine, et comme fatigués du travail de vivre, levant les yeux au ciel, ils pleuraient. Où sont-ils, etc., etc.

Des lieux inconnus, où le fleuve se perd, deux voix s’élèvent incessamment.

L’une dit : Du fond de l’abîme j’ai crié vers vous, Seigneur ; Seigneur, écoutez mes gémissemens, prêtez l’oreille à ma prière. Si vous scrutez mes iniquités, qui soutiendra vos regards ? Mais près de vous est la miséricorde et une rédemption immense !

Et l’autre : Nous vous louons, ô Dieu, nous vous bénissons ; Saint, saint, saint ! Le Seigneur Dieu des armées ! La terre et les cieux sont remplis de votre gloire !

Et nous aussi, bientôt nous irons là d’où partent ces plaintes ou ces chants de triomphe. Où serons-nous ? Qui nous le dira ? Heureux les morts qui meurent dans le Seigneur.


sainte-beuve