Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 5.djvu/409

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
395
REVUE. — CHRONIQUE.

franche de la caserne ; ce n’est pas l’obscénité des maisons sans nom, armée d’équivoques à double tranchant ; c’est une sorte de langage hybride qui tient de tout cela. Mais je ne conseille pas aux femmes de lire l’Origine d’une comtesse ; autant vaudrait pour elles passer une heure à la salle Saint-Martin, avec les escrocs et les prostituées.

Il y a cependant dans les Rhapsodies un sentiment honorable et dont je remercie l’auteur, c’est celui d’une pauvreté fière. Mais s’il ne fréquente pas les vicomtesses, comme il s’en vante, pourquoi ferait-il aux poètes ses confrères un crime d’aimer les armoiries, le blason, le velours et la soie ? Chacun son goût. À M. Petrus Borel le chenevis, la poésie lycanthropique et son bon poignard ; à d’autres ce que l’auteur des Rhapsodies appelle un luxe pachalique. N’était la lycanthropie, j’aimerais mieux pachalesque.

À travers toutes ces folies, j’ai entrevu quelques lueurs d’un talent vrai. Par malheur, dans ses manies de nature et de rudesse, le poète lycanthrope préfère trop souvent la boue et la fange aux rochers et aux chênes.

Mais où diable a-t-il été nommer son livre Rhapsodies ? Ceci est de l’homérisme pur. Puisque M. Petrus Borel excommunie à l’avance ceux qui croiront et ceux qui ne croiront pas à son mérite poétique, il eût été plus simple, en application de sa théorie, d’appeler son recueil : Papel por cigaritos ? Que vous en semble ? Il n’y a là rien de pachalique. Les pachas ne fument qu’avec des narghilé.



LA VIEILLE FRONDE,


PAR M. HENRY MARTIN

Le succès de la trilogie historique de M. Vitet a sans doute paru à M. Henry Martin le dernier mot de la poésie dramatique. De plus habiles docteurs que lui s’y sont laissé prendre ; et un critique d’une singulière sagacité, qui a rendu à la littérature d’incontestables services, a long-temps soutenu contre l’avis des poètes et des artistes, que le dernier effort de l’art et de la poésie était la réalité complète.

Aujourd’hui que cette théorie a fait son temps, on commence à comprendre les erreurs auxquelles elle a conduit. Les statuaires et les peintres avouent d’un accord unanime que le modèle le plus habilement copié ne saurait suffire