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Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 5.djvu/588

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PHILOSOPHIE DE FICHTE.

milieu des circonstances où elle a agi, il serait complètement impossible qu’il fût autre qu’il est, de l’épaisseur d’un cheveu ou d’un infiniment petit.

C’est ainsi qu’à chaque instant de sa durée, l’univers se présente comme un tout harmonique. C’est ainsi qu’il n’est pas une seule de ses parties intégrantes, qui, pour être ce qu’elle est, ne rende nécessaire que les autres soient ce qu’elles sont. De ces parties, vous ne pourriez en déplacer une seule, fût-ce un grain de sable, sans que ce déplacement ne devînt aussitôt le centre d’une multitude d’autres déplacemens de parties, insensibles peut-être pour vos yeux, mais n’en allant pas moins rayonner en tout sens à travers les espaces infinis. Ce n’est pas tout. Comme tout se tient dans le temps aussi bien que dans l’espace ; comme l’état de l’univers, à un instant donné de sa durée, est nécessairement déterminé par ce qu’il a été, et détermine non moins nécessairement ce qu’il doit être, au déplacement de ce grain de sable il faudra que viennent se rattacher aussi deux autres séries d’altérations successives à l’ordre de l’univers : l’une qui remonterait à l’infini dans les temps écoulés, l’autre qui s’étendrait de même à l’infini, dans les temps qui ne sont pas encore. Supposons, en effet, que ce grain de sable soit de quelques pas plus avant dans les terres qu’il ne l’est réellement. N’aurait-il pas fallu que la vague qui l’a porté où il est, l’eût poussé avec plus de force ; pour cela, que le vent qui a soulevé cette vague eût été plus violent ; et pour qu’il le fût, que la température de l’atmosphère différât ce jour-là de ce qu’elle a été. Or, cette température ne pouvait être autre à moins que celle de la veille ne fût autre aussi, à moins que ne fussent autres aussi celles des journées précédentes, et l’on se trouvera ainsi conduit à supposer dans notre atmosphère une succession de températures toujours différentes de ce qu’elles auront été effectivement. Les corps qui s’y trouvent exposés, en auront reçu une influence toute autre. La terre s’en sera ressentie. Les hommes n’y auront point échappé. Qui le sait donc ? Car si les mystères que la nature recèle dans son sein doivent nous demeurer cachés, peut-être ne nous est-il pas interdit d’essayer de soulever par la pen-