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un souvenir. C’est un épisode vrai, autrement envisagé, sous un autre climat, avec d’autres mœurs, et des ressorts différens.

En poursuivant cette lecture, j’éprouvais successivement toutes ces douces et précieuses impressions qu’on ne saurait éviter en contemplant un paysage du Ruysdael. Je me sentais enlevé à toutes les tracasseries dont la journée est remplie. Il se faisait autour de moi un profond et solennel silence. Ma poitrine s’élargissait, ma vue devenait plus vive et plus nette. Mes yeux apercevaient un horizon harmonieux, mais sans parure et sans emphase, moins amoureux de l’effet que Turner ou Claude Lorrain.

Toute la fable de Paulding repose sur les évolutions successives par lesquelles passe un jeune homme timide et embarrassé près de la femme qu’il aime, mais courageux et hardi quand il s’agit de la sauver, tremblant et n’osant lui prendre la main, mais voyant de sang-froid la mort à deux doigts de lui. Il y a peut-être dans l’analyse de ce caractère une délicatesse tatillonne et microscopique qui rappelle la monographie du hanneton de M. Straus. Mais puisqu’on a pardonné à Leibnitz de commencer son histoire du duché de Brunswick par un chapitre de géologie, on aurait mauvaise grâce à blâmer les scènes curieusement étudiées où Paulding met en relief cet accident réel de la pensée humaine.

Le style de la traduction est élégant et souple, chose trop rare dans les traductions de ces sortes d’ouvrage.

Je conseillerai volontiers la lecture du Coin du feu comme une promenade au mois de mai, sur la pelouse, au lever du soleil.


M. Émile Lecomte, libraire-éditeur, rue Sainte-Anne, n. 32, vient de publier la sixième et dernière livraison d’un ouvrage précieux à plusieurs titres, commencé il y a quelques années par M. Aimé Chenavard, et composé de dessins d’ameublemens, de décorations intérieures et de tapis. Ce recueil unique et qui retrace sous une forme piquante et sévère les principales époques de l’art, doit être suivi d’une seconde partie qui lui servira de complément. C’est pour les artistes et les gens du monde un sujet d’études profitable.