Page:Revue des Deux Mondes - 1832 - tome 5.djvu/718

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
703
ITALIE. — ÉTATS SARDES.

intellectuel qui s’opéra en Italie depuis le treizième jusqu’au dix-septième siècle. Occupé dans des guerres continuelles, il n’est arrivé que tard sur la scène, mais en conservant une force vierge, lorsque tout allait en vieillissant autour de lui. En effet, après la moitié du siècle dernier, on vit apparaître subitement Lagrange, Alfieri, Berthollet, Bodoni, noms célèbres en Europe, et qui portèrent au plus haut degré la gloire scientifique et littéraire du Piémont ; mais qui, par une fatalité malheureuse, furent tous contraints de quitter successivement le sol natal, les uns pour chercher à l’étranger des moyens d’existence, les autres pour y trouver la liberté d’exprimer leurs pensées. Cependant le Piémont profita de cette première impulsion, et les sciences et les études sévères s’y développèrent avec rapidité. Le comte de Saluzzo, très connu pour ses recherches sur les gaz, et que Lavoisier a placé parmi les trois restaurateurs de la chimie, institua chez lui une société scientifique qui, en publiant les Mélanges de Turin, mérita l’admiration de l’Europe savante. Beccaria et Cigna, par leurs belles expériences sur l’électricité, répandirent le goût de la saine physique ; Allioni fit fleurir l’histoire naturelle, et l’abbé de Caluso, homme d’un immense savoir, ouvrit la route à de profondes études classiques. La société particulière de M. de Saluzzo fut érigée en académie royale des sciences en 1783, et ses mémoires, quoique privés de la coopération active de Lagrange, soutinrent l’honneur du pays. On créa pour Michelotti l’établissement hydraulique de la Parella, qui n’a pas son égal en Europe ; l’école militaire, l’université et les autres institutions scientifiques furent protégées et agrandies ; et tout promettait qu’elles prospéreraient rapidement, lorsque la guerre que le Piémont eut à soutenir contre la révolution française, et l’invasion qui en résulta, vinrent paralyser le mouvement des esprits. Pendant le règne de Napoléon, Turin, quoique favorisé par l’empereur, n’étant plus un centre d’action, perdit la plus grande partie de son influence ; mais, en 1814, le roi de Piémont, en rentrant dans ses états, s’empressa de rétablir l’université et l’académie, dont l’organisation avait été changée pendant l’occupation française. Près de trois mille élèves accoururent des provinces dans la ca-