La publication de la Grammaire égyptienne résoudra, nous l’espérons, les doutes des consciences sévères qui ne trouvaient pas dans les lettres à M. Dacier et à M. de Blacas un caractère suffisant d’évidence et d’authenticité. Et s’il en était autrement, si le conservateur du musée égyptien, si le professeur du Collége de France, après avoir promené sa curiosité de Thèbes à Memphis, et d’Alexandrie au Caire, n’avait rapporté de son voyage qu’une série de problèmes insolubles, qu’un programme de questions qu’il ne devait jamais épuiser ; si le dépit et le découragement avaient hâté ses derniers momens, il faudrait le plaindre sans doute, et l’admirer. Tout homme capable de sacrifier sa vie à la réalisation d’une idée, a droit aux louanges de son siècle et de la postérité.
Et jugez de l’embarras où se trouvent maintenant les pères de la science, les gardiens consacrés du temple ! À qui donner l’Égypte ? Que deviendra l’Égypte ? Faudra-t-il y renoncer ? Quel traducteur de Pausanias, d’Aristote ou de Platon osera se présenter pour remplacer l’inventeur de la syntaxe et des dynasties de Memphis, celui qui avait bouleversé toutes les chronologies, toutes les généalogies que Rollin avait revêtues de la dignité universitaire ? Je suppose que son successeur aura communication de ses manuscrits, et s’engagera par serment à continuer ses travaux.
En attendant que l’Institut se réduise, comme la raison et le bon sens l’exigent impérieusement, à la seule académie des sciences, dont on ne saurait, sans injustice, contester les services éminens, en attendant que l’aristocratie officielle de l’érudition et du talent succombe sous la moquerie et l’indifférence, l’aristocratie nobiliaire a relevé la tête et rompu le silence prudent qui à coup sûr ne lui était pas moins utile qu’à feu Conrart de muette mémoire. M. le comte Eugène d’Harcourt a paru à la tribune du palais Bourbon, pour défendre les ambassadeurs. L’ambassadeur d’Espagne, celui même qui n’avait pu maintenir au chapeau de ses laquais la cocarde tricolore, qui avait eu les vitres de son carrosse brisées par la canaille de Madrid, ses armoiries lacérées à coup de pierres, et que le dégoût avait ramené